Rugby amateur – Violence, on fait quoi du coup ?
La politesse, la correction, la propreté, la gentillesse, le respect de soi, des autres, des aînés, des bons mots (les magiques surtout, pas les gros), voilà ce qui incombe à l’éducation parentale. L’éducation nationale elle, permet d’apprendre à écrire, à compter, à réfléchir, à donner les bases fondamentales qui feront de petits bonhommes, des bons hommes. Ainsi fonctionne le passage de témoin entre générations, la transmission des savoirs : vivre, faire et être.
Et puis, il y a une autre école, celle du rugby, qui apprend aux gamins, aux ados et même aux adultes, le courage, la camaraderie, la solidarité, l’humilité, le dépassement de soi, et en piqûre de rappel permanente, le respect. Ces fameuses valeurs dont nous sommes si fiers, à juste titre, sont remises en question par des actes insupportables, isolés, mais répétés… (par Jonah Lomu – RugbyAmateur.fr)
Le weekend dernier est un exemple de plus, et assurément de trop. Les arbitres, au même titre que les forces de l’ordre à la ville, ou les profs en classe, ne sont plus intouchables, donc respectés. Critiqués, conspués, insultés depuis les tribunes et les bancs de touche aussi, ils sont malheureusement bousculés et molestés sur le terrain.
Les valeurs du rugby restent pour autant indélébiles, mais elles ne sont, et resteront, que complémentaires à celles transmises à la maison et à l’école. Pas un éducateur, pas un entraîneur, ne va évidemment prôner la violence contre un joueur et encore moins contre un arbitre. Et pourtant, pas un dimanche ne s’écoule désormais sans une furieuse bagarre, une agression ou la venue de gendarmes.
Depuis déjà trop longtemps, les « poings » de rencontre sur le pré vert, se sont propagés jusque dans les tribunes, et au-delà. Le chambrage, la provocation, les intimidations, d’usage et dosées en fonction des circonstances, ont laissé place aux défis, aux insultes, aux menaces et comme une fatalité, aux coups, dont la fureur n’a d’égal que celle qui se développe dans notre société. Et comme on le dit si souvent au comptoir d’un club house : le sport est le reflet de la société. Et le rugby un miroir éclairant.
Les injustices sociales, l’inflation, l’austérité, les discours politiques, séparatistes, frontistes, créent un climat déréglé lui aussi, et anxiogène. Les médias, avides d’exclusivités quotidiennes, s’en nourrissent avec gourmandise, des émissions télé avides de… vide, attisent la colère et l’agressivité, tout en contribuant à l’affaissement culturel. Les réseaux sociaux parachèvent l’oeuvre générale, en jouant son rôle de tribunal du net. Et donc du trouble permanent.
La part de responsabilité des clubs ?
Oui, la société, divisée, décivilisée et ensauvagée, a changé. Le moindre mot ou regard de travers, le moindre désaccord, provoquent des réactions intempestives, souvent démesurées, incontrôlées, et parfois irréparables. Sur fond de frustration, de colère, de jalousie, de haine, et de désespoir aussi, les violences verbales et physiques sont devenues récurrentes. Les bousculades et les prises de becs sont remplacées rapidement par des coups de poings, de pied, une certaine bestialité même, un retour aux instincts primaires.
Inévitablement, cette violence s’est installée derrière des mains courantes, devenues agrippantes, et armées de couteaux parfois. Le public ainsi chauffé à blanc (au rouge, au jaune ou à tout autre alcool aussi), vient déverser son trop plein et sa rage le dimanche à 15h. Sur le terrain des joueurs confondent saine agressivité et scène agressive.
Le rugby amateur est ainsi pointé régulièrement du doigt, à juste titre malheureusement, pour des faits de violence aggravés. Des clubs entretiennent une réputation et un héritage d’un rugby « d’antan gueule » peu enviables. Le rugby professionnel, pas toujours exemplaire, fait aussi les gros titres, pour des « écarts de conduite », tout aussi condamnables. A l’image des virées nocturnes des joueurs du Stade Français récemment, de Bastien Chalureau, sans oublier Antoine… Battut. Comme les compagnes de Mohamed Haouas et Wilfrid Hounkpatin.
Alors les clubs sont-ils responsables de tous ces excités, jeunes ou anciens, parents ou simples curieux ? Non.
Les clubs sont-ils responsables d’un joueur qui craque et balance une droite à un arbitre par derrière ? Non plus.
Les clubs agissent et réagissent comme ils peuvent face à l’improbable, l’imprévisible. Ils écrivent des communiqués préventifs, sanctionnent, puis excluent, mais ne peuvent pas tout. Le rugby ne peut pas tout face à des actes isolés.
Poing final !
Mais comme le mal est profond, il faut le combattre à ses racines, car les excès sont répétés et toujours plus… excessifs. La montée de la violence et de la délinquance est sociétale certes, mais les instances ont le devoir de taper à leur tour du poing… sur la table. L’avenir du rugby passe par plus de communication, prévention et de sanctions. Tolérance zéro, sinon, toutes les belles phrases et tous les soutiens de façade ne seront que de la poudre aux yeux.
Et tiens, en parlant de poudre, inquiétons-nous de la blanche qui circule si facilement un peu partout, et donc dans les vestiaires. Ces joueurs qui voient rouge de temps à autre, ont peut être les yeux rougis avant d’entrer sur le terrain non ? Certains flirtent avec les lignes, d’autres en font visiblement un autre usage, avant de les franchir. Sujet tabou ? A priori oui. Mais il serait temps de le traiter avant que tout le monde justement, ne soit à bout.
Une éducation plus stricte, le civisme à la place du laxisme, des sanctions plus fortes, et pourquoi pas, des contrôles anti-dopage. Le début d’un commencement pour éviter tous ces coups, de grâce. Et l’on pourra alors reprendre la merveilleuse phrase de Jean-Pierre Rives : « Le rugby permet aux enfants de devenir des adultes, et aux adultes de rester des enfants ». L’ancien capitaine du XV de France était respecté pour son exemplarité sur le terrain, comme le sont aujourd’hui les Antoine Dupont, Greg Alldritt et autres Charles Ollivon, capitaines et têtes de proue du vaisseau bleu. L’exemplarité, le respect et la transmission, encore et toujours. Sinon, on finira par perdre des licenciés et accuser le coup. Poing final !
Quelques exemples extrêmes et trop répétés de la violence dans le rugby amateur
Belascain – Chambéry-Coudon, « une scène d’une rare barbarie »
Thibaud Marty (ouvreur Saint-Gaudens) : « Déplorable pour notre si beau sport ! »
Incidents Fleury Salles Coursan – Haut Vernet : les deux clubs finalement exclus du championnat
Sanctions : Quatre ans après les faits, un rugbyman d’Artix condamné à de la prison
Sanction : Monflanquin-Nontron, prison ferme pour l’auteur du coup de poing
Fédérale 3 : Le Puy en Velay – Navarrenx, un supporter frappe l’arbitre à la sortie du terrain