Il y a un mois, nous apprenions que faute de terrain homologué, l’Association Sportive Loisir Club Olympique Pontlieue Rugby Le Mans ne disputerait pas de compétition officielle cette saison. La jeune présidente, Nora Millot, revient pour Rugby Amateur sur ce forfait surprenant et le combat qu’elle mène depuis plus d’un an pour sauver son club. Entre espoirs, colère et tristesse…
Nora Millot est arrivée au club de Pontlieue en 2017 en provenance de la région bordelaise. D’abord joueuse en équipe senior, elle devient bénévole puis secrétaire de la section féminine. Nora intègre ensuite l’équipe dirigeante et, en janvier 2023, la jeune femme de 33 ans se propose pour remplacer Urbain Demmin à la présidence de l’ASL CO Pontlieue Rugby Le Mans. Mais tout dérape durant l’été qui suit, lorsqu’une panne d’électricité plonge leur stade Pierre Piffault dans le noir.
La lumière n’est jamais revenue et les équipes n’ont pas pu reprendre le chemin de la compétition en début de saison. En un peu moins de deux ans à la tête du club, Nora Millot ne s’attendait pas à vivre de telles difficultés. Entretien.
Norah Millot, pouvez-vous nous raconter comment votre club s’est retrouvé sans stade ?
Nora Millot : « Quand j’ai pris la présidence début 2023, on savait que notre stade Pierre-Piffault, qui appartient à Renault, était en vente. Et durant l’été, Renault a connu une coupure d’électricité qui a également touché le stade. Comme le complexe était à vendre, ils n’ont pas voulu lancer de réparation et l’électricité n’est jamais revenue. Alors on s’est mis à chercher toutes les solutions possibles, en faisant des devis, en cherchant des financements.
Et en février 2024, Renault nous a finalement un peu stoppé dans nos démarches en nous disant que de toute façon le stade était en vente et qu’il fallait trouver une autre solution, en cherchant un autre terrain, ailleurs.»
« La mairie s’était pourtant engagée à nous soutenir »
C’est à ce moment que la ville du Mans vous propose de racheter le terrain ?
N.R. « La ville nous avait déjà prêté un terrain pendant l’hiver pour pouvoir maintenir les entraînements. Mais au mois de mars dernier, Le Mans accueillait un match du tournoi des Six Nations féminin (contre l’Irlande au stade Marie-Marvingt). Durant cet évènement, la mairie s’est engagée à nous soutenir et à nous accompagner pour que l’on puisse continuer nos activités.
Ce qui nous a été communiqué, c’est que la Ville avait fait une proposition de rachat du terrain à Renault, mais nous n’avons jamais eu la confirmation ni de retour sur ce sujet. C’est parfois décourageant de se battre pour quelque chose qui n’aboutit à rien de concret. »
Quelles solutions existaient encore ?
« La seule solution qui nous a été offerte, c’était de nous mettre à disposition le même terrain que celui de l’an dernier. Mais celui-ci n’est pas adapté ni homologué pour la pratique du rugby. Il y a plein de cailloux, il n’y a qu’un seul vestiaire, c’était donc impossible de s’engager en compétition sur ce stade et de disputer des matchs officiels. On n’a pas eu d’autres propositions de la mairie, donc forcément les joueurs ont fini par aller ailleurs.
Alors oui, il y a un autre club au Mans, déjà financé par la Ville, mais pour le COP, qui existe depuis plus de 70 ans et qui avait entre 150 et 200 licenciés, il y avait largement la place d’exister. La ville du Mans peut avoir deux clubs, on ne joue pas au même niveau. »
Régionale 2 : à défaut d’un terrain homologué, un club contraint de déclarer forfait
Et la Fédération dans tout ça ?
« La Fédération suit notre dossier. Au printemps dernier, il y avait eu des rencontres avec Renault pour tenter de trouver une solution, au moins provisoirement. La FFR est également en contact avec la ville, mais ce ne sont pas eux qui ont les pouvoirs sur les prises de décisions. Et du côté de la Ligue, on n’a pas trop de nouvelles.»
« Les féminines s’entraînent dans un parc sur un carré d’herbe… »
C’est d’autant plus désolant que sur le point sportif, vos équipes performaient ?
« On avait un vivier de joueurs de qualité. L’équipe senior a remporté un bouclier régional en R2 et les féminines à 10 ont été championnes régionales et interrégionales. Aujourd’hui, elles sont obligées de s’inscrire en cross-rugby car il n’y a pas assez d’effectif. On était la seule équipe féminine en Sarthe, donc pour la promotion du rugby féminin, ce n’est pas super… D’autres joueuses sont obligées de faire deux heures de route à leurs frais pour continuer de jouer au rugby à XV dans un autre club. Quant aux gars, ils ont demandé des mutations dans les structures aux alentours, ou ont carrément arrêté le rugby.»
Qu’est devenu le Stade Pierre Piffault ?
« Au jour d’aujourd’hui, il existe encore… Renault attend toujours de le vendre. Il y a les tribunes, les deux terrains, rien n’a changé et aucun travaux n’a commencé sur la partie qui leur appartient. »
Quel est l’avenir de l’ASL COP Pontlieue Rugy Le Mans ?
« On continue de solliciter la Mairie et des collectivités aux alentours, mais les échanges restent très limités. Il n’y a que l’école de rugby, qui chaque mercredi peut jouer sur un terrain adapté. C’est notre seul créneau, désormais, les féminines s’entraînent dans un parc sur un carré d’herbe et l’équipe senior masculine est forfait. On essaye de continuer à construire avec les petits et les quelques équipes qui nous restent. Finir la saison comme on peut et tout faire pour reprendre l’année prochaine sur plus de catégories.»