C’est le 15 du mois, l’occasion pour nous de vous livrer un entretien particulier. Confortablement assis dans l’un des fauteuils du salon de l’Hôtel du Commerce, à Montauban, Patrick Gorinat ouvre son pc portable et étale quelques feuilles devant lui. « Je suis prêt », nous dit-il dans un petit sourire. Pas de doute, le secrétaire général du club des Pandas de Montauban a bien préparé son interview. Tant mieux, car RugbyAmateur.fr vous propose une immersion dans le rugby à XIII fauteuil, discipline handisport dont Montauban est aujourd’hui l’une des places-fortes en France. Et ne croyez pas que les adversaires se ménagent parce qu’ils sont invalides ! Il suffit de voir l’engagement des joueurs/joueuses des deux équipes pendant une rencontre pour en oublier la discipline aménagée en version handisport et n’en garder que la vision pugnace d’un match de rugby. Pour tout savoir, même sur l’origine du mot « pandas », suivez le guide… (Interview par Wildon – Photos : Alain Garres, Karima Baddi, Cyril Langeard et Pandas de Montauban )
Patrick bonjour, on peut se dire « tu » ?
Bien sûr ! (sourire) Ce sera beaucoup plus sympathique.
Alors en quelques mots, peux-tu te présenter ?
J’ai été d’abord joueur de rugby à XIII à Villeneuve-Tolosane, Toulouse-Jean-Jaurès et Toulouse Olympique jusqu’à l’âge de 24 ans. De 2001 à 2006, j’ai été conseiller technique d’Etat à la FFXIII et, depuis 2006, conseiller d’animation en Tarn-et-Garonne. En parallèle, j’ai été joueur et entraîneur des Pandas de Montauban entre 2007 et 2016. Depuis, j’en suis le secrétaire général.
Quelle présentation peux-tu nous faire du club des Pandas ?
Le club a été créé en 1984 comme club handi-omnisport avec notamment du tir à l’arc, de l’aviron et du foot-fauteuil électrique dont Montauban était alors le meilleur club de France et d’Europe au début des années 2000. En 2007 a été créée la section de rugby à XIII fauteuil. L’équipe a été sacrée championne de France Elite 2 en 2017 et vice-championne de France Elite en 2022. Montauban compte aujourd’hui dans le Top 3 des équipes en France, avec les Dragons Catalans et Avignon en figures de proue.
Les règles…
Combien de joueurs compte l’équipe de rugby à XIII fauteuil ?
Cette année, nous avons 17 joueurs et 15 dirigeants, membres du staff et accompagnateurs compris
Comment est constitué le championnat de France Elite ?
En France, il y a une vingtaine de clubs constitués mais seuls 9 d’entre eux qui disputent un championnat cette saison sur une poule unique et répartie entre zone Est et zone Ouest. A l’issue de la phase de brassage, les meilleures équipes disputeront le titre de championne de France Elite 1, les autres celui d’Elite 2. Il existe aussi le Challenge de l’Avenir qui une compétition dédiée aux équipes « développement ». Les meilleurs clubs pourront intégrer le futur championnat Elite 2. D’ailleurs, les Pandas ont engagé leur équipe 2 dans ce Challenge de l’Avenir avec l’objectif d’avoir à terme nos deux équipes dans les deux niveaux Elite.
Peux-tu expliquer à nos lecteurs qui ne le savent pas forcément, comment se déroule une partie de rugby à XIII fauteuil ?
Un match se déroule sur un terrain de hand-ball avec une zone d’en-but aménagée, des poteaux amovibles et un marquage au sol balisé avec du scotch. Le rugby à XIII fauteuil n’a pas de tracé spécifique bien que le règlement international exige, lui, un traçage défini. Un match dure 80 minutes en deux mi-temps de 40 minutes et une mi-temps de 10 minutes. Chaque équipe compte cinq joueurs sur le terrain. Le principe de l’essai reste le même que dans le rugby à XV ou à XIII : il faut que le joueur aplatisse le ballon au sol à la main au-delà de la ligne d’en-but.
Et pour le jeu « au pied » ?
Tout est remplacé par le jeu « au poing », que ce soit pour une pénalité, un drop, une transformation, une passe à un autre joueur ou une passe à suivre.
Y’a-t-il une particularité propre au rugby à XIII fauteuil ?
Hormis son format, le rugby à XIII fauteuil est effectivement mixte à plus d’un titre. La discipline est composée d’hommes et de femmes, de mineurs (à partir de 16 ans pour les séniors) et de majeurs, d’invalides et de valides.
Des valides qui font de l’handi donc ?
Exactement. Sur un terrain, on tend à tolérer seulement deux joueurs valides au maximum. Ils sont sanglés sur le fauteuil comme n’importe quel joueur handicapé.
Justement, en parlant du fauteuil, on voit bien qu’il s’agit d’appareil très spécifique, avec des roues inclinées et sans doute des renforcements bien particuliers. Comment est-ce que c’est géré au niveau du club ?
La gestion des fauteuils dépend des clubs. Les joueurs en situation de handicap peuvent bénéficier d’une aide à son achat, moyennant la constitution d’un dossier. Parfois, cependant, les clubs peuvent financer l’achat des fauteuils, ce qui est le cas à Montauban. Dans ce cas précis, si le joueur part, le club conserve le fauteuil et peut servir à un autre joueur.
En moyenne, combien coûte ce type de fauteuil ?
Il faut compter environ 7 000€, plus les pièces de rechange et son entretien. Mais la durée de vie d’un fauteuil est de cinq à six ans en moyenne. Quand la première soudure intervient, souvent entre deux et trois ans après son achat, c’est le début de la lente agonie du fauteuil (rires). Maintenant, nous avons au club des fauteuils qui ont dix ans d’âge mais on s’en sert uniquement pour des opérations de sensibilisation.
De quels types d’opérations s’agit-il ?
On fait des actions en milieu scolaire, collèges et lycées surtout. Il s’agit de sensibiliser les élèves à la perception et à la différence de l’autre. On fait aussi des actions avec des entreprises locales qui nous soutiennent, comme Pro à Pro dernièrement. Ces actions et démonstrations sont aussi propices pour nouer des partenariats voire obtenir des aides financières.
Les Pandas sont-ils bien soutenus justement ?
Nous sommes déjà un club bien reconnu par les institutions et la Fédération et nous sommes très bien soutenus par la Ville de Montauban, le Conseil Départemental, le Conseil Régional et la CPAM, pour le volet social. A cela, il faut préciser que nous nous déplaçons grâce aux véhicules de l’Office Municipale des Sports de la ville de Montauban. Mais, en termes de soutien, je veux aussi parler des supporteurs qui nous suivent et nous encouragent à chaque rencontre.
Ils sont nombreux ?
Une bonne centaine à chaque fois. Contre les Basques d’Aingirak Euskadi de Bayonne-Anglet, ils étaient environ 160. Ca met une belle ambiance dans la salle de la Fobio où nous évoluons.
Revenons à l’équipe qui semble faire une nouvelle très belle saison avec de très beaux résultats (1)…
C’est vrai mais ce qui nous importe, ce ne sont pas nécessairement les résultats mais la durée des choses, la constance et l’état d’esprit qui prédomine au club. Des gars viennent jouer à Montauban alors qu’ils habitent Cahors, Lalbenque ou Toulouse et où se trouvent déjà des clubs. C’est finalement très révélateur de cet état d’esprit qu’on trouve chez les Pandas.
Il y a aussi des internationaux…
Oui, nous en avons trois : Lionel Alazard (international français, double champion du monde 2013 et 2017, vice-champion du monde 2022), Jean-Yves Ducos (international français et champion du monde 2013) et Yannick Martin (international espagnol, présent au championnat du monde 2022).
Et un nouveau coach cette saison ?
Oui, Benoît Farges et Régis Thomas sont partis à la fin de la saison dernière et Maxime Chatain nous a rejoint. Il faut préciser qu’il a joué avec les Pandas de 2013 à 2017, donc il connaît très bien le milieu du rugby-fauteuil. Il a été aussi jusqu’à récemment l’entraîneur de Bressols en XV. Quand on lui a proposé de devenir le coach des Pandas, il a dit « Je viens tout de suite » et tout se passe très bien. Un changement d’entraîneur est un moment important pour une association et n’est pas toujours simple. On a vécu quelques jours d’incertitudes difficiles jusqu’à la venue de Maxime. Mais, comme je l’ai dit, tout se passe très bien. Il nous apporte des choses et une vision différente. Il faut aussi parler de notre président actuel, Nicolas Gisquet, ou du trésorier Pascal Werth sans oublier les trois photographes qui suivent notre équipe (Alain Garres, Karima Baddi et Cyril Langeard), et tous ceux et toutes celles qui nous aident au quotidien.
Juste avant de clore cette interview, une dernière petite question : pourquoi les Pandas ? Ca ne fait pas très « féroce » surtout quand on voit le logo du club…
Je me doutais que tu allais me poser la question (sourire). Ce nom vient d’une boutade née d’une troisième mi-temps un peu trop arrosée où un joueur a interpellé le président de l’époque en lui disant « Vous avez une tête de panda ! » Les autres clubs ont choisi de noms qui font peur mais nous, on a choisi de devenir les Pandas de Montauban. Un nom et un logo qui font sourire mais nous n’en restons pas moins « féroces » sur le terrain…
CALENDRIER DES MATCHS A VENIR
Dimanche 5 février 2023 à Montauban (Salle de la Fobio) : tournoi « développement » entre Pandas de Montauban 2, Stade Toulousain 2 et Cahors Lot XIII.
Samedi 25 février 2023 (championnat Elite) : Stade Toulousain – Pandas de Montauban
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- Victoires en Elite 1, poule Ouest, contre Stade Toulousain (96-16), Aingirak Euskadi (104-30) et Lions de Saint-Jory (85-22) et victoire au tournoi « développement » de Biganos (2022) avec trois succès en trois matchs contre les Dragons Catalans 2, Aigles de Biganos 2 et Cahors Lot XIII.
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