Samedi, au stade du Pavillon Bleu, antre du Saint-Jean-de-Luz Olympique, la sélection basque des Euskarians accueillait l’équipe nationale de Belgique, venue passer deux semaines dans le Sud-Ouest pour se préparer aux Rugby European Championship. Un vrai événement, car le dernier match de la formation menée samedi par Patrice Lagisquet, Serge Milhas (SJLO) et Sébastien Fauqué (Anglet), contre une équipe nationale, remontait à 2015. Cette opposition face à la 29ème nation mondiale (composée de nombreux joueurs évoluant en France) s’annonçait également autrement plus relevée pour les Euskarians, que lors de leur dernier match, contre la Catalogne en juin (victoire 50 à 5)… (par Ophélie, Ax-les-Termes, photos Jean-Marc Lestage)
Le contexte
Cette rencontre s’inscrivait donc dans le cadre d’un stage de préparation de la sélection belge, en vue du Rugby European Championship (équivalent du tournoi des 6 Nations B), qu’elle débutera le 3 février contre le Portugal. Lors de la précédente édition, les Black Devils étaient opposés aux Pays-Bas, à la Pologne, l’Espagne, la Roumanie, le Portugal, sans oublier bien sûr la Géorgie, et ont terminé septièmes. Ils se présentaient donc samedi bien préparés et très motivés de valider la semaine passée ensemble. À noter qu’une grande partie des joueurs belges évoluent dans les championnats français. Par exemple, le centre Florian Remué est champion de France espoir 2023 avec le Stade Toulousain, tandis que l’ailier Dazzy Cornez (Mâcon), le deuxième ligne Chris Baudry (Marmande) et l’autre ailier, Thomas Wallraf (Langon), jouent tous trois en Nationale 2. Dans le XV de départ, quatre autres joueurs sont engagés en Fédérale 1. Une formation donc très compétitive se présentait au Pavillon Bleu.
En face, la sélection basque réunissait des joueurs amateurs issus principalement des clubs d’Anglet, de Saint-Jean-de-Luz, en Nationale 2, et de Nafarroa en Fédérale 1. Ceux d’Hegoalde (Pays-Basque Sud) étaient pris par le championnat espagnol ce week-end. C’était la première rencontre des Euskarians face à un pays depuis 2015 (défaite contre l’Uruguay 19-41 et victoire contre le Chili 31-14). Entre temps, l’équipe a été mise en pause six ans, notamment à cause du Covid, et a réussi son retour en juin, face à la Catalogne, à Saint-Sébastien (victoire 50-5).
L’association, fondée en 1997 par Gérard Murillo, ancien joueur de Mauléon, Bayonne, du XV de France et longtemps entraîneur de Saint-Jean-de-Luz, vise à réunir les joueurs des sept provinces basques (France et Espagne) autour de leur identité commune. En février dernier, ses co-présidents ont annoncé vouloir développer la section de rugby à 7, pratique plus compatible avec les calendriers des championnats français. Si elle maintient au moins une rencontre par an à XV, elle ouvre également un centre de formation transfrontalier nommé « Euskarians Zazpi Akademia » (Académie à 7 des Euskarians) et espère bientôt organiser un tournoi international de rugby à 7.
Avant le coup d’envoi, les Euskarians sont entrés sur le terrain en arborant fièrement leurs bérets sur la tête, qu’ils ont ensuite offerts à leur adversaire du jour, en cadeaux de bienvenue. S’en est suivi un hommage à Thomas, jeune joueur de Romans-Péage tué la semaine dernière et à Gérard Murillo, fondateur des Euskarians donc, et figure du rugby basque, décédé début octobre. Enfin, les Euskarians ont respecté une des tradition de l’équipe, en se mettant a genoux en cercle, au centre du terrain, tandis qu’au milieu, l’un deux a porté haut l’ikurriña (drapeau basque). Dans les tribunes, le public, venu nombreux à cette fête du rugby basque a participé à une bonne action par la même occasion. En effet, les bénéfices réalisés samedi ont été reversés à l’association “Hegoak Mendian, Le Trail en joëlette”, qui permet à des coureurs et des personnes à mobilité réduite de faire des excursions ensembles en montagne.
Le match
Dès que la Belgique donne le coup d’envoi, le manque d’automatisme au sein de la sélection basque se fait ressentir, par des maladresses et des fautes. Les « Blacks Devils » en profitent à la 3ème minute, pour ouvrir le score sur pénalité, par l’intermédiaire de leur centre Remué. Les locaux rééagissent et inscrivent le premier essai de la rencontre, à peine trois minutes plus tard, par Sam Spring, joueur de Nafarroa, frère de Tom (Racing 92) et Max (Aviron Bayonnais). L’ouvreur Curutcet transforme et valide un bon début de match des Euskarians (7-3, 6ème).
Mais la domination basque est stoppée net à la 28ème minute, car le n°6 Obamé reçoit un carton jaune. La Belgique profite alors des dix minutes en supériorité numérique pour inscrire deux essais et prendre de l’avance au score. L’ailier Cornez franchit en premier la ligne à la 28ème (7-8), puis il est imité par son troisième ligne aile Bastin, à la 33ème. Remué ne transforme que le deuxième et scelle donc le score du premier acte à 7-15.
En deuxième période, les erreurs techniques de part et d’autres empêchent longtemps les deux équipes de mettre en place luer jeu et naturellement, de franchir la ligne. Alors que les Basques prennent les pénaltouches, pour tenter de marquer un nouvel essai, les Belges eux, se mettent dans l’esprit du Tournoi B, pour le préparer au mieux, et choisissent donc les points. Rémué en ajoute d’abord 3 à la 58ème (7-18), puis l’autre centre et capitaine Torfs, passe une nouvelle pénalité à la 71ème (7-21). Mais la persévérance de l’équipe locale, même menée au score, va finir par payer. La Belgique craque une première fois et écope d’un jaune à la 77ème, les Euskarians en profitent pour marquer à la 79ème, par Rodriguez, sorti du banc (12-21). De quoi clôturer cette rencontre amicale en beauté et ravir le public du Pavillon Bleu.
Réactions
Anthony Cachenaut, 2ème ligne et capitaine des Euskarians : « On savait que ça allait être compliqué, car on ne s’est entraîné qu’une seule fois ensemble. C’était un match tout de même très intéressant à jouer, face à une équipe belge bien en place. On a été très vaillant en défense malgré les 3 essais encaissés, d’ailleurs l’un d’eux est sur un contre. On nous avait demandé de garder plus le ballon, au lieu de leur rendre rapidement et ça a bien marché sur la fin. On a fini un peu mieux qu’eux physiquement et on se rapproche au score, dommage donc que l’on n’ait pas marqué plus tôt. On a tout de même fait un bon match aujourd’hui. À titre personnel, je suis très fier d’avoir été capitaine de la sélection Pays Basque. »
Jens Torfs, 3/4 centre et capitaine de la Belgique : « On connait tous les qualités des joueurs basques en général : ils sont vaillants et ne lâchent rien jusqu’à la 80ème minute. C’était donc un bon test pour nous, d’autant plus car on ne s’était pas vu depuis un mois et que le groupe a beaucoup changé. La prochaine étape pour nous est le Tournoi des Six Nations en février, que l’on démarre contre le Portugal. Durant le stage, nous avons passé une superbe semaine au Pays-Basque, que nous avons pu découvrir davantage. »
Patrice Lagisquet, coach des Euskarians : « C’était plaisant de voir cette équipe avec un seul entraînement dans les jambes réussir à performer aussi bien, comme si elle se connaissait parfaitement. Malheureusement, ça a été difficile de garder le même niveau de jeu sur les 80 minutes, mais c’est plutôt logique face à une formation belge qui sort de 5 jours de stage. Sur cette rencontre, l’état d’esprit insufflé depuis l’époque du comité Côte Basque Landes et des gens comme Roger Etcheto ou Gérard Murillo a perduré, en témoigne ce dernier essai en fin de match. Ces gars qui ont l’habitude de s’affronter, se sont cette fois retrouvés et ont fait preuve de beaucoup de courage et de solidarité. L’intensité de la Belgique ne m’a pas surpris, car je l’ai déjà rencontrée à de nombreuses reprises, que ce soit avec le Portugal dans le tournoi B ou en Super Cup avec les Lusitanos. Leur jeu repose sur du combat, un paquet d’avant solide, une bonne mêlée, des mauls bien structurés, et de temps en temps des accélérations. Ils ont également un bon jeu au pied et un bon buteur, ce qui leur permet d’exister dans le tournoi. »
Laurent Dossat, coach de la Belgique : « Nous sommes très contents d’avoir pu disputer cette rencontre. Merci à tous les dirigeants des Euskarians d’avoir accepté, malgré les contraintes sportives des joueurs en championnat. On a pu bien analyser nos points forts et nos points faibles, en vue du Tournoi des 6 Nations B. Je suis également très satisfait de notre performance, car on avait demandé aux joueurs de valider l’état d’esprit guerrier et défensif que l’on a travaillé. Ils l’ont bien fait en deuxième période, car on était privé de ballons, mais on ne prend qu’un seul essai, à deux minutes de la fin. Ce match clôture notre stage au Pays-Basque. C’était important pour moi de débuter mon mandat d’head-coach ici, pour que l’on s »imprègne de toutes les valeurs de cette région, tellement en adéquation avec le rugby. »
Feuille de match
Euskarians 12 – 21 Belgium Rugby (MT : 7-15) – Arbitre : Anthony Mercapide
Composition de Euskarians : Antchagno, Cazenave, Perez, Bergounioux, Cachenaut (c), Obamé, Dioné, Bidegain, Gouaux (m), Curutchet (o), Hannoun, Spring, Jauréguiberry, Bérot, Cahuzac
Sur le banc : Landrodie, Lagikula, Echeveste, Le tiec, Alvarez de Eulate, Cancillo, Labadie, Hourcade, Tarascon, Queheille, Bonnard, Rodriguez
Composition de la Belgique : Sotteau, Upton, Opsomer, Hendrickx, Baudry, Louveaux, Bastin, Rassinfosse, Berger (m), Gott (o), Wallraf, Torfs (c), Remué, Cornez, Rousselle
Sur le banc : Cuffolo, Pinte, Vermeersch, Calomme, Tauzia, Deceuninck, Gerard, Rifon, Dequenne, André, Dulieu, Pazgrat, De Francq, Moucheron