Vendredi en fin de journée, la photo des capitaines sonnait le début officiel du tournoi pré-olympique qui offrait à son vainqueur un ticket pour Tokyo. Le TQO donc (plus pratique et plus court à écrire), ouvrait ses portes à Colomiers, centre européen du rugby à 7 le temps d’un week-end. RugbyAmateur.fr était évidemment présent pour couvrir cet événement de fin de saison… (par David Campese, photos de Léa Forrat, William Donnarel, Serge Gonzalez)
L’ambiance est bon enfant en ce samedi matin. le match d’ouverture est programmé à 12h00, mais déjà du monde circule dans les allées du stade Bendichou. Les premières poignées de mains, les premières bises, les premiers clins d’oeil. Notamment avec Julien Candelon, parrain historique de votre média bien aimé. Le « team manager » des équipes de France à 7 n’hésitait pas à comparer son bonheur d’avoir touché le Brennus en 2009 et ce parrainage un an plus tard. Le weekend commence bien.
Sur le terrain d’entraînement, défilent les équipes sous nos yeux. Et ceux conquis des demoiselles, admiratives de ces apollons aux dorsaux et aux abdominaux saillants. Mais trêve de considérations extra-sportives et dirigeons-nous vers le premier match du jour.
L’Angleterre ouvre le bal, et à la fin, les musiciens lituaniens comptent 40 points dans la musette. L’écart de niveau entre les douze meilleures nations européennes est manifeste. Mais la hiérarchie à 7 bouscule celle du XV. Ainsi, l’Allemagne présente de solides arguments, physiques, mais pas seulement, au point de dominer des Géorgiens mal réveillés. Les matchs s’enchaînent, l’Irlande cartonne l’Ukraine, tout comme l’Espagne face à la Russie. Pas de quoi enlever le sourire à son entraîneur Waisale Sérévi, légende fidjienne du rugby 7.
Et puis la France fait son entrée dans la compétition. Sans surprise, sans peur, mais pas sans reproches pour causes de nombreuses maladresses, les tricolores disposent facilement de la Hongrie. En descendant de la tribune de presse, on croise le chemin de ces Hongrois, malmenés, essoufflés, mais diablement courageux. Petit pouce levé vers l’un d’eux, qui, en retour, esquisse un sourire, et nous lance un : « Oh, on fait ce qu’on peut ! ». Surprise, nous aurait-on glissé sans nous prévenir, une oreillette capable d’une traduction instantanée ? Que néni, nous venions de croiser la route de Thomas Ducrocq : « Je suis franco-hongrois, je joue pour la Hongrie à 7 et à 15. En club, je joue Chateaurenard en fédérale 2. » Ah ok, ok, et alors c’est comment le rugby en Hongrie ? « C’est une véritable aventure, depuis plusieurs années déjà. On est une équipe amateur, on va jouer dans des pays peu habitués au rugby, dans des hôtels improbables, après des trajets rocambolesques. Mais c’est une aventure de vie formidable. En 2016, on a fait un tournoi en Angleterre, mais comme on n’avait pas de moyens, on a dormi pendant deux nuits dans les vestiaires, à même le sol. Ce qui nous a soudés bien évidemment. Donc être là, aujourd’hui, dans le Top 12 européen, à jouer contre la France notamment, c’est quelque chose d’énorme pour nous ! »
Et Thomas n’est pas le seul Franco-Hongrois. Martin Sacaze, espoir à Valence-Romans, fait aussi partie du contingent. Il nous a confié son ressenti : « C’est historique pour la Hongrie, et pour nous les joueurs. Le pays a bâti ce projet d’une équipe à 7, sur 5 ans. Ça fait 5 ans qu’on dispute des tournois pour progresser dans la hiérarchie. On commence à avoir des résultats, on progresse petit à petit, mais on a un groupe qui vit bien ensemble. On est fiers d’en faire partie. La fédération met plus de moyens, elle nous a permis notamment de nous préparer dans de meilleures conditions pour ce tournoi pré-olympique. C’est une bonne chose. » Et Thomas Ducrocq de rajouter : « C’est vrai. Et l’autre point positif dans cette équipe, c’est qu’on peut boire des bières et manger une pizza, sans qu’on ne vous dise rien (rires). »
Hongrois rêver. En revanche, on ne rêve pas quand on voit un Jacuzzi derrière le poteaux. Certains s’y distinguent, comme des Coqs Léguevinois, venus en voisins avertis…
Soudain, on nous signale la présence de Kiss… Le stratosphérique et légendaire groupe masqué de hard rock américain des années 80 serait-il en vedette de la soirée bodéga prévue le soir même ? Non, encore raté. Il s’agit de Kiss… Antal, le président de la fédération Hongroise de rugby. La cinquantaine radieuse, cet homme politique et ancien sportif, nous accorde une interview exclusive. Car oui, nous sommes curieux d’en savoir plus sur ce rugby hongrois en plein développement : « Nous avons misé sur le rugby depuis peu, mais la fédération soutient de plus en plus ses équipes, à 15 comme à 7. Notre pays est un pays où le football est roi, mais nous sommes convaincus que le rugby, et notamment à 7, est une belle vitrine pour notre pays. La preuve avec notre présence ce weekend au milieu de toutes ces nations majeures du rugby européen et mondial. Notre qualification ici est déjà une première victoire pour notre staff, qui fait de l’excellent travail. Nous savons que cela prendra du temps, mais comptons 16 clubs à l’heure actuelle, on sent que la pratique du rugby intéresse de plus en plus nos compatriotes. »
Kiss Antal a délaissé le costume cravate qu’il porte habituellement, pour une tenue plus sportive, et répondre à un défi de taille : passer un drop sur cinq tentatives ! Après quatre échecs consécutifs, le président a pris son temps et a ajusté une frappe peu académique, mais efficace. Le ballon est passé entre les perches, sous les vivas de la foule : « Je savais que j’allais réussir » nous a-t-il glissé malicieusement « je voulais juste maintenir un peu de suspense pour la foule ». Hongrois ce qu’on veut après tout.