« On me refuse l’accès à certaines informations ! »
Jean-Paul Taipunu ne comprend pas cet entêtement, il est alors obligé de prendre lui aussi un avocat et confie son dossier à Maître Katy Mira, qui avait mis sur la place publique cette histoire dans le journal local Sud Ouest : « Trois mois après l’accident, mon client venait d’être papa de son premier fils, fin mars. Sa compagne ne travaillait pas, pour s’occuper de leur nourrisson justement, et lui était cloué sur son lit d’hôpital. Je pense que le président du club mélange tout : les fonds de la Fondation Ferrasse, et la cagnotte solidaire. Les 10 000 euros ont été mis sur le compte des enfants de mon client, car il ne sait pas ce qui va advenir. S’il lui arrive quoi que ce soit, au moins, ils auront ça pour eux. » L‘espoir d’apaiser les tensions et de solder les comptes semblait donc réel. Le Président du RCPR se fendra d’un très long texte en guise de droit de réponse au journal local, pour justifier toutes ses décisions, et qu’il sort meurtri de cette affaire, qu’il espère clore le plus rapidement possible (voir son droit de réponse)
Un an jour pour jour après l’accident, qu’en est-il concrètement ? Nous avons contacté Maître Mira, qui nous donne plus de précisions : « Monsieur Berdet détenait les fonds de façon illégale sous prétexte qu’il craignait que les personnes tiers n’en fassent pas un bon usage. A propos de la cagnotte Leetchi, tout est transparent car il est impossible de tricher sur le montant reçu et à reverser. En revanche, concernant tous les chèques envoyés par les clubs et par des particuliers aussi, j’ai reçu un versement de la part de l’avocat de M. Berdet, qui couvrait, selon lui, la totalité des sommes reçues. J’ai tout de même demandé à en connaître la somme exacte, avoir les justificatifs, ainsi que les noms des donateurs, pour pouvoir les remercier. Or, on m’en a refusé l’accès. Donc j’ai déposé une plainte, pour qu’une enquête soit ouverte. Elle est en cours, donc je ne peux vous en dire plus. »
Ce conflit, détestable compte tenu des circonstances, s’est en plus déplacé sur un terrain sensible. A savoir que le président de Roquefort n’aurait pas voulu remettre les fonds à la femme du joueur blessé, sous prétexte qu’elle ne travaillait pas, et qu’elle était issue de la communauté des gens du voyage. L’avocate précise : « Je ne peux rien affirmer à ce sujet. Ce que je peux dire en revanche, c’est que cette femme est parfaitement intégrée, elle a des origines de cette communauté, oui, mais dont elle ne fait pas partie pour autant. Mais je ne vois pas en quoi cela serait un souci. En tant qu’avocate de M. Taipunu, je dois défendre ses intérêts, et je peux vous dire que sa femme les défend avec une ardeur remarquable, exemplaire, il n’y a aucun reproche à lui faire, j’en suis la première témoin. Pourtant, le parquet a été saisi pour enquêter sur le couple, sur la base d’une alerte, pour que Jean-Paul soit placé sous tutelle. C’est totalement incompréhensible. Aucun sportif victime de ce genre d’accident n’a fait l’objet d’une telle demande. L’UDAF (Union Départementale des Associations Familiales) des Landes ne comprend pas non plus. Comme une enquête pénale est en cours, je n’ai pas encore accès au dossier et il m’est donc impossible, pour le moment de savoir qui est à l’origine de cette demande. Mais nous le saurons bientôt. »
Une autre plainte est en cours, à l’encontre du joueur qui a blessé Jean-Paul. L’avocate a écrit à la FFR pour avoir plus d’informations relatives aux circonstances de l’accident : « J’ai souhaité savoir avec exactitude le matériel présent ce jour-là, mais aussi tout ce qu’il s’est passé ensuite. A priori, il est difficile de me donner plus de détails. J’ai donc écrit au procureur de la République pour ouvrir une enquête à ce niveau-là aussi. Mais je tiens à souligner que j’ai un très bon contact avec l’avocat de la GMF, qui, au nom de la FFR, va prendre en charge le préjudice, et se montre particulièrement à l’écoute et réactif »
Ces tensions et ces plaintes, Jean-Paul s’en serait bien évidemment passé, d’autant plus qu’elles restent plus que jamais d’actualité : « J’ai été contraint de mettre mon club au tribunal pour récupérer l’argent des dons. Ce qui a été chose faite en septembre. Le dossier reste ouvert car j’ai aussi porté plainte contre mon président. Comme par hasard, un enquêteur est venu nous voir dans la foulée, sur la base d’un signalement à l’assurance. Et enfin, après réflexion, j’ai décidé de porter plainte contre le joueur qui m’a blessé, pour coup volontaire. Sur le ruck précédent, il m’avait mis une droite. Sur le plaquage, ce n’est pas sa hanche que j’ai heurtée, mais bien son genou, il m’attendait, je suis certain qu’il l’a fait exprès. J’ai demandé ses coordonnées au club de Sainte-Livrade, mais les dirigeants ont refusé de me les donner. je veux pouvoir me dire que justice sera rendue. C’est trop important pour moi. »
« J’ai de la colère en moi ! »
Difficile donc de faire abstraction de ce qu’il vit comme une injustice et un rejet. La gestion du quotidien étant suffisamment compliquée : « On habite dans un appartement de plein pied, depuis deux mois On le réaménage pour l’adapter à mon fauteuil. On espère pouvoir faire construire plus tard. Franchement, mentalement, je vais mal, je n’accepte pas l’accident, ni tout ce qui s’en est suivi. J’ai eu un bébé le 25 mars (un petit Aito, qui signifie guerrier en tahitien), je ne peux pas le porter, ça me fait de la peine pour mon fils. J’ai de la colère en moi, envers le président et le coach de mon ancien club, ils se disaient comme mes frères, mais quand je vois la tournure des choses, je suis écœuré. J’ai laissé des messages, mais personne ne vient me voir, je ne reçois même pas une carte. Ma famille en France, comme mes amis m’ont tourné le dos. J’ai en revanche deux ou trois anciens amis de l’armée qui m’appellent eux, pour prendre des nouvelles. Ma seule famille, c’est ma femme et mes enfants. Ma femme est très courageuse, elle a accouché seule, elle ne m’a pas abandonné, elle est encore là, elle s’occupe de moi tous les jours. J’en profite ici pour lui rendre hommage, elle qui a été salie dans son amour propre. Je ne souhaite à personne ce qui m’est arrivé, c’est un véritable drame. L’accident, ma femme enceinte, puis le covid, le tribunal, c’est très dur mentalement. »
L’échange est sans filtre, l’émotion réelle, la vie d’un homme a basculé ce 12 janvier 2020. Le début d’un parcours du combattant qu’il reste, pour sa famille.
PS : Dans le cadre de cet article, nous avons contacté le club de Roquefort qui nous a donné les coordonnées de Serge Berdet. Ce dernier n’a pas répondu à nos appels. Nous n’avons pas sollicité le club de Sainte-Livrade car une instruction est en cours. Nous avons en revanche contacté l’avocat de Serge Berdet, Maitre De Brisis à Mont-de-Marsan, mais là aussi, alors que nous avons expliqué à son étude que nous allions diffuser un article, nous n’avons pas été rappelé comme demandé à deux reprises.
A ce niveau de l’amateurisme, comment peut-on finir dans un imbroglio judiciaire. Solidarité rugby où es-tu ? Ce garçon a sa vie détruite et a plus besoin de soutiens que de combats. Si le commentaire est exact, on ne peut pas laisser un garçon dans cette situation. La FFR a répondu présent, tout à son honneur ainsi que la fondation Ferrasse. En ces périodes il faut trouver un « terrain « d’entente. Tout le monde en sortira vainqueur.
Je te soutiens de Tahiti ! Le soleil veille sur toi et ta famille !