Lundi dernier, un article diffusé sur Rugbyrama et le Midol ont provoqué un séisme dans le milieu du rugby. Deux joueurs de l’Isle-Jourdain étant accusés d’avoir tenu des propos racistes à l’encontre de Kévin Sanda et Yannick Larguet, joueurs de Balma, lors de la rencontre du 3 avril dernier, en fédérale 2. L’onde de choc s’est propagée aussi rapidement que massivement par de nombreux médias, et sur les réseaux sociaux. A tel point que même Thierry Dusautoir exprimait son soutien aux Balmanais sur con compte Facebook.
Pierre Lahille, président de L’Isle-Jourdain, mécontent du fond et de la forme à propos de l’article diffusé, a envoyé un courrier à Serge Pratmarty, son homologue à Balma, ainsi qu’à la rédaction des deux médias concernés. Un courrier que le président gersois nous a adressé dès aujourd’hui et autorisé à diffuser en primeur sur notre site. Loin de nous l’idée de prendre position sans avoir ni les tenants, ni les aboutissants. Encore moins de mener une enquête ou d’accuser qui que ce soit, nous avons juste préféré contacter les principaux concernés, pour qu’ils puissent au moins s’exprimer officiellement dans un média. Ce qu’ont accepté de faire, et nous les en remercions, Pierre Lahille, Serge Pratmarty, Paul Aygobere, le capitaine de l’Isle-Jourdain et Yannick Larguet, trois quart de Balma, et au coeur de la polémique. A chacun ensuite de se faire sa propre opinion…
Paul Aygobere (2ème ligne et capitaine de L’isle-Jourdain) : Il y a eu des mots, comme dans tout match, c’est certain, mais en aucun cas des propos racistes. L’article paru cette semaine fait état d’insultes à répétition en plus. Je suis au coeur des débats, je les aurais entendues je pense. Je trouve inadmissible de pouvoir tenir des propos racistes dans la vie, autant que sur un terrain, donc si j’avais entendu la moindre insulte de ce genre, je m’en serais occupé personnellement. Les gens qui me connaissent le savent bien. Nous avons une équipe composée d’un international ivoirien, d’un sénégalais, de plusieurs joueurs de Polynésie aussi. J’ai appelé Kévin Sanda en effet, que je connais, mais pas pour m’excuser comme le prétend l’article. Je l’ai appelé pour me renseigner, car je ne savais pas ce qui s’était dit. Il m’a confirmé avoir été insulté, qu’il était énervé sur le coup, mais il m’a fait comprendre aussi qu’il n’y avait pas de quoi en faire toute cette histoire. je lui ai donc dit que j’étais bien désolé, si cela était avéré.
Serge Pratmarty : Je n’ai rien entendu pendant le match, normal je suis en tribunes. A la fin du match, j’étais dans le vestiaire en revanche, la victoire nous assurait le maintien, donc tout le monde était joyeux. Mais j’ai remarqué que Yannick Larguet était comme abattu dans son coin. C’est là qu’il m’a dit avoir été traité tout le match. Que dire ? C’est quelqu’un de respectable, il a un passé reconnu dans le rugby, il a 36 ans, pourquoi irait-il raconter ce genre d’histoires si ce n’était pas fondé ? Mon avis est qu’il y a eu des mots, j’en suis convaincu. Le président de L’Isle-Jourdain m’a appelé trois jours après, pour autre chose, et on a évoqué le sujet. Je lui ai expliqué que Yannick allait envoyer un courrier, il ne semblait pas être au courant, et m’a présenté ses excuses. De même que le capitaine de L’Isle, qui s’est aussi excusé auprès de Kévin Sanda par téléphone. Quand on s’excuse, ce n’est pas pour rien je crois. Je n’ai rien contre L’Isle, ni ses dirigeants et ses joueurs, mais j’espère que le président fera le nécessaire auprès du ou des joueurs concernés. En tout cas, moi, à sa place, je ferai le ménage. Maintenant, je considère que cette histoire est close, passons à autre chose. Même si je peux comprendre que mes joueurs soient blessés, je ne veux pas jeter d’huile sur le feu, cela ne servirait à rien.
Pierre Lahille (président de l’Isle-Jourdain) : Je suis content de pouvoir m’exprimer car je suis vraiment touché par cette histoire, je le vis même très mal. Pour commencer, contrairement à ce qui est avancé sur l’article du Midol, je n’ai reçu aucun courrier à ce jour. Je me suis renseigné sur le journaliste qui a écrit cet article, qui ne l’a pas signé de son nom. Je l’ai obtenu et je l’ai appelé à plusieurs reprises, je lui ai laissé des messages, mais j’attends toujours qu’il me rappelle ! On accuse le club sur des faits qui, jusqu’à preuve du contraire, ne sont pas avérés. Il n’y pas eu d’enquête non plus comme le stipule ce journaliste. Mais nous avons quand même organisé une réunion avant hier, pour évoquer le sujet entre tous, et rien ne me permet à ce jour de confirmer ce qui est reproché à nos deux joueurs. Oui, je me suis excusé auprès de Serge Pratmarty par téléphone, en expliquant que si les accusations étaient fondées, c’était normal de les présenter. Car cette histoire est détestable, et je pense que de telles accusations méritent un minimum d’investigation. Tout cela a pris une importance démesurée. Nous avons plusieurs joueurs de couleur dans notre équipe, je suis moi-même le père adoptif de David, tahitien, talonneur de l’équipe. Il aurait été le premier à me faire remonter des insultes racistes, je le sais. Le club a fait partir un container récemment en Afrique pour soutenir un autre club local. Je suis atterré par cette histoire.
Yannick Larguet (centre Balma) : Lors du match aller à l’Isle-Jourdain, il y avait déjà eu des propos et des faits à caractère racistes. Je m’en suis expliqué personnellement avec le joueur concerné au téléphone ce jour, qui s’en est excusé. Sur ce match retour, c’est le deuxième ligne de l’Isle cette fois, qui n’a pas arrêté d’insulter Kévin Sanda. J’y ai eu droit également. En tant que capitaine, je suis allé voir l’arbitre pour lui signaler. Il n’ a pas réagit. Pourtant quelques minutes plus tard, il a reconnu avoir entendu des insultes, mais ne sachant pas d’où elles venaient, il m’a indiqué qu’il ne pouvait sanctionner personne. Il y avait alors deux solutions : soit on craquait et on se battait, au risque de faire perdre le match à l’équipe, qui jouait le maintien ce jour-là, soit on ne disait rien. Et on a décidé de ne rien dire. Mais je peux vous assurer que nous en avions les larmes aux yeux. Je n’avais évidemment pas le coeur de rester au repas d’après match. J’ai donc décidé d’envoyer un courrier au président de l’Isle-Jourdain, qu’il n’a visiblement pas reçu. Donc aujourd’hui, je lui ai envoyé un mail, qui reprend précisément la chronologie des faits. Je lui fait part de ma tristesse à la suite de ces « incidents », et lui explique que je suis sincèrement désolé pour l’image que cela renvoie du club, mais ce n’est pas moi qui la salit, mais bien les personnes qui tiennent ce genres de propos. Aujourd’hui, je suis las d’entendre que je suis un menteur, que je mets le feu au club de l’Isle. J’ai 35 ans, je suis père de famille, marié, cadre dans la fonction publique territoriale, j’ai 10 ans de carrière professionnelle derrière moi, j’ai autre chose à faire que de créer des polémiques. Je prône le partage et la tolérance, j’éduque mes enfants ainsi. Je suis convaincu que nous partageons la même passion du rugby avec le président de L’Isle-Jourdain, club que je respecte par ailleurs, mais je pense aussi qu’il devrait agir pour que cela n’arrive plus jamais. Je m’exprime ici aujourd’hui par souci de transparence, en mon nom et celui de Kévin Sanda. Je ne m’exprimerai plus sur ce sujet désormais, en espérant que cela s’estompe le plus rapidement possible.
Le courrier que Balma et Midi Olympique vont recevoir demain
Monsieur,
Suite aux parutions dans Midi Olympique et Rugbyrama et qui enflamment les réseaux sociaux, nous souhaiterions vous informer que ni le club ni moi-même avons reçu à ce jour une lettre provenant de tout joueur ou dirigeant de Balma, comme il est stipulé dans vos articles. Il est donc difficile de comprendre les faits qui nous sont reprochés à travers la presse et qui blessent profondément tout un club.Ce qui nous interpelle c’est qu’à l’issue du match et au cours de la réception qui a suivi, personne ne se soit plaint ou ne nous ait approché sur ce sujet et que cela surgisse 3 semaines après la rencontre. De plus pour ce match nous avions demandé à nos frais, deux arbitres suppléants (touche), afin de soulager l’arbitre central. Aucun des arbitres, ni le représentant fédéral, n’a avisé notre capitaine de propos racistes qui auraient
pu être adressés à l’encontre de joueurs adverses ou autres ‘’mauvais coups’’. Aucun rapport de leur part ne peut supporter ce qui nous est reproché.Sachez que notre club, et à tous les niveaux, oeuvre au quotidien pour une intégration de joueurs quelques soit leurs origines, cultures ou confessions, et que nous y veillons en dirigeants responsables. Les compositions de nos équipes peuvent en témoignées. C’est ce que j’ai exprimé au journaliste lors de la communication téléphonique.
D’autre part nous ne cautionnons pas le droit de publier ce genre d’article en ne s’appuyant pas sur des preuves
tangibles. Soyons, s’il vous plait tous responsables pour condamner ce genre de faits lorsqu’ils sont avérés mais également évitons des communications aléatoires qui peuvent être dangereuses par les temps actuels.Je souhaite au nom du club vous inviter à passer un moment avec nos dirigeants, éducateurs pour vous montrer les actions que nous menons au quotidien et notamment la dernière qui est un support matériel à un club Africain par le biais d’un de nos joueurs actuellement en activité professionnelle dans ce pays.
Je vous remercie de votre compréhension et restons à votre disposition.
Bien sportivement
Le Président de l’USL, Pierre LAHILLE
L’article paru dans Rugbyrama lundi
FEDERALE 2 – C’est une bien triste affaire : la rencontre entre Balma et l’Isle-Jourdain (3 avril dernier) a été entachée par des faits à caractère raciste de la part de deux joueurs de l’équipe gersoise.
Le racisme, il existe aussi sur un terrain de rugby. La rencontre de Fédérale 2 entre Balma et l’Isle-Jourdain du 3 avril dernier en est bien la triste preuve. Au cours de ce match, deux éléments de l’équipe gersoise ont multiplié des actes à caractère raciste (mauvais coups, provocations et insultes) à l’encontre de deux joueurs de couleur de la formation de Balma : le flanker Kevin Sanda et le capitaine Yannick Larguet (ex-Bourgoin, Colomiers, Agen)
L’Isle-Jourdain a mené une enquête
Ces faits n’ont fait l’objet d’aucun rapport de la part de l’arbitre de la rencontre (remportée par Balma sur le score de 28-20) puisque celui-ci n’a rien entendu ni constaté sur le terrain. Le président de l’Isle-Jourdain a mené de son côté une enquête après avoir reçu un courrier émanant de Yannick Larguet comme le rapporteMidi Olympique. S’il n’a rien entendu durant le match, il a questionné les deux joueurs mis en cause. Et ces derniers ont reconnu les faits.
Mal à l’aise, le président gersois a alors présenté ses excuses à son homologue de Balma. Le capitaine de l’USL a pour sa part contacté par téléphone le troisième ligne Kevin Sanda pour en faire de même. Reste à savoir si la FFR va s’emparer de cette affaire bien triste…