Encore une fois, les supporters de Saint-Girons s’étaient déplacés en nombre pour soutenir leur équipe, qui décidément, les gâte énormément cette année. Il restait un dernière marche pour rendre cette saison plus historique qu’elle ne l’était déjà. Face à eux, l’équipe lot-et-garonnaise de Villeréal, et une chaleur étouffante. Mais rien ne pouvait empêcher les Lions Verts de signer un doublé historique… 100 ans plus tard ! (par Jonah Lomu)
Le début de la rencontre est équilibré, teinté d’observation dans les deux camps. Villeréal, vent force 2 dans le dos, ouvre le score par une pénalité de son buteur Benjamin Mauvrit à la 4ème minute. Pas le temps de douter côté ariégeois, puisque Jean-Christophe Parenti, bien remis de sa blessure au bassin de dimanche dernier, s’engouffrait dans la défense de Villeréal pour aller pointer le premier essai du jour (7-3, 8ème). Les deux finalistes démontrent leurs qualités en défense, et s’envoient aux quatre coins du terrain. Alors à défaut de percer le rideau défensif, on s’essaye au drop. Ce que Mauvrit, l’artilleur lot-et-garonnais, réalisé à la perfection puisqu’il en claque deux coup sur coup au bout de vingt minutes de jeu (7-9). Sur le renvoi, Parenti, décidément en très grande forme, se signalait à nouveau par une action personnelle, jouait un par-dessus astucieux pour lui-même et envoyait Collad-Sanchez, son ailier, en terre promise (14-9, 21ème). Malgré la chaleur, le rythme est très soutenu et l’on assiste à du beau rugby. A l’image de Mauvrit, qui lui aussi, dans une grand jour, adresse une belle diagonale au pied à son ailier Praderie, qui surprend la défense saint-gironaise. Villeréal, un peu contre le cours du jeu, repasse donc devant au score avant la pause (14-16).
La force des hommes du Couserans est de ne rien lâcher. Ajoutez-y une dimension physique et technique au-dessus, et vous avez le parfait amalgame de ce qu’une équipe en confiance peut réussir. Et cette deuxième mi-temps sera finalement le reflet de toute une saison, et de ces phases finales totalement maîtrisées. Guillaume Lazerges tout d’abord, maître à jouer derrière un pack conquérant mais aussi fine gâchette au pied. Il passe une pénalité à la 45ème pour redonner l’avantage aux vert et noir (17-16). Saint-Girons domine, et fait mal à son adversaire, valeureux en défense. Un peu avant l’heure de jeu, Dissegna et Durrieu combinent bien, pour envoyer l’intenable Parenti à l’essai. Le break est fait et l’on sent alors que plus rien ne peut arriver aux hommes d’Heymans et Tessarotto. Ces derniers insistent sur le pressing haut et récupèrent un ballon que Jonathan Parenti, cousin de Jean-Christophe, ira déposer entre les perches. Jean-Christophe inscrira même un dernier essai à quelques minutes du terme pour porter la marque à 34-19, Mauvrit ayant réduit le score entre-temps sur pénalité. M. David Rosich (comité Armagnac-Bigorre) sifflait al fin du match et envoyant tout le peuple du Couserans au paradis. L’histoire est belle, 100 ans après le doublé des lions verts, trois ans après avoir été au bord du gouffre, voilà Saint-Girons au sommet, porté par des hommes qui ont relancé un club sur des valeurs simples mais ô combien efficaces. Voilà Saint-Girons dans un costume de champion de France qui lui va à merveille, celui des Pyrénées était mérité mais trop petit cette année. La fête pouvait commencer, et se terminer tard, très tard…
Photos Pascal Villalba
Réactions
Benoît Tessarotto (Entraîneur 3/4 Saint-Girons) : « En un mot, c’est juste énorme ! »
Le sentiment qui domine, c’est d’avoir réussi une saison accomplie. On a tout gagné, que demander de plus. c’est une aventure humaine exceptionnelle, avec des gens du cru. On a souvent rappeler dans nos discours qu’il fallait savourer, se souvenir d’où on venait. A titre personnel, on marque encore 5 essais, 20 en tout pendant ces phases finales dont 19 des 3/4. Les avants ont permis de mettre les arrières dans les meilleures dispositions, ce qui résume assez bien le lien qui existe entre tous. On partait dans l’inconnu en début de saison, mais on voulait faire mieux que l’an dernier. Si je dois résumer la saison en un mot ? Énorme ! J’avais déjà connu les joies d’un titre national avec l’entente Auterive-Saverdun en cadets, mais le vivre avec une équipe séniors, c’est quand même autre chose. On sent une attente tellement forte de tout un village. Pour la saison prochaine, on va essayer de garder l’ossature et jouer le maintien. La poule s’annonce très compliquée, alors restons humbles. On va bien profiter du titre quand même (rires).
David Dissegna (ouvreur Saint-Girons)
C’est indescriptible ! Oon a tellement eu le sentiment de jouer pour une ville, une région même. C’est une grande fierté. J’ai joué 24 ans à Auterive, je suis arrivé au club pour rejoindre des amis, en suivant Lionel (Heymans) et voilà comment l’aventure a commencé. On fait beaucoup de kilomètres chaque semaine pour s’entraîner et jouer, donc on prend ça comme une récompense énorme. On espérait faire un beau parcours en régional. Mais en championnat de France, il faut un peu de chance. Battre Montesquieu en 1/4 de finale des Pyrénées a été un acte fondateur dans notre quête. Et puis, gagner contre Gruissan, qui était le grand favori, par leur dimension physique et des ex pros, nous a fait prendre conscience qu’on pouvait aller au bout. On a répondu présent, avec un brin de réussite parfois, mais avec maîtrise. Je me souviens aussi du match retour en play off contre Rieumes qui nous avait mis 40 points à l’aller. On craignait d’en reprendre une bonne, et puis c’est nous qui leur mettons 30 points, avec la manière. On a fait un grosse 3ème derrière. Il fallait prendre conscience de nos qualités et de nos capacités à les exploiter. C’est formidable, on va essayer d’en profiter un maximum avant de passer à l’avenir.
Lionel Heymans (entraîneur avants Saint-Girons) : « On se sentait invincibles »
Je pense que la victoire est méritée. Même si Villeréal s’est montré réaliste en première mi-temps. Je n’ai pas douté, mais on rate une pénalité facile, eux passent deux drops, avec poteau rentrant, on rentre aux vestiaires avec deux points de retard, alors on cogite un peu. Mais on maîtrise bien la 2ème mi-temps, on est patient, solide en défense, dans l’organisation aussi. Et on prend le dessus, à l’image de ces phases finales. Quand on voit le monde qui s’est déplacé, c’est exceptionnel. Quelle saison, quand on voit de là où on vient, c’est incroyable. Il n’y avait que du bonheur à prendre. Les joueurs ne réalisent pas tout à fait je pense, dans 10 ans, 20 ans, toute leur vie, ils s’en souviendront. On s’est senti presque intouchables en cette fin de saison, comme un sentiment d’invincibilité. C’est rare, très rare dans une carrière. je l’avais connu comme joueur, mais là, sur le banc, c’est très particulier. Il y a eu des moments difficiles malgré tout. La victoire contre Montesquieu en play off a été comme un déclic, en 1/2 contre Saint-Affrique, on est sorti du terrain abîmés (victoire 11-10). S’il n’y avait pas eu de coupure entre ces deux matchs, on n’aurait jamais pu gagner. Après la finale des Pyrénées, je redoutais le premier match en France. Même si je ne le pensais pas tout à fait, j’ai dit aux joueurs qu’on était les champions de notre quartier, mais que si on voulait être grands, il fallait s’exporter. Les joueurs ont été grands, très grands. Les anciens comme les jeunes. A eux, je leur ai de bien en profiter, car vivre ça à 18 ou 19 ans, ça n’arrive pas à tout le monde. On est rentré hier chez nous pour partager ce titre, car c’est aussi celui de tout un village, qui s’est déplacé massivement. On les en remercie d’ailleurs.
Jean-Philippe Bringué (2ème ligne) : « Je ne pouvais pas rater ce match ! »
C’est historique, ça faisait 100 ans que le club n’avait pas connu un doublé. En fait, j’ai pas les mots tellement les émotions sont fortes. Quel engouement. la moitié de la ville s’est déplacée à Castelsarrasin hier. J’ai tout connu avec ce club, les hauts et les bas. c’est un rêve d’enfant, on se sentait capable de gagner le titre régional. mais il a fallu s’y remettre, notamment en play off, où on s’est fait bousculer. Personnellement, je jouais sur une jambe et demi, mais je savais que je pouvais compter sur les copains. Toute la semaine j’ai soigné mon mollet en allant voir des kinés, osthéo, et des marabous (rires). Ma compagne ne m’a pratiquement pas vu de la semaine tellement j’étais à droite ou à gauche. Je me suis fait infiltré vendredi soir et avant le match et ça a tenu. Même si je savais que je n’étais pas à 100%, je ne pouvais pas rater ce match. Et pour tout dire, le soutien dont j’ai fait l’objet par les coachs et les copains restera gravé pour moi. Je ne voulais pas handicapé l’équipe pour autant. je ne pouvais pas sprinter, mais je pouvais courir. Ça se joue dans la tête de toute façon. Je connais mon corps, surtout à 35 ans. Et je peux dire que je suis incollable sur le fonctionnement du mollet maintenant ! On va profiter du titre et il sera temps de parler de l’avenir. Ca fait 25 ans que je joue au rugby, ma passion, et je n’aurais jamais imaginé réaliser un doublé de la sorte. Alors profitons de ces instants !
La feuille de match
Villeréal 19 – Saint-Girons 34
Pour Saint-Girons : 5 essais de J.-C. Parenti, Collado-Sanchez, Jo. Parenti, 1 pénalité et 3 transformations de Lazerges.
Pour Villeral : 1 essai de Praderie, 2 pénalités, 2 drops et 1 transformation de Mauvrit.
VILLEREAL : Velez, Reigne, Escande, Chenu, Dastic, Serres, Beauvié, Paulard, Boursinhac, Conduché, Praderie, Fornaiser, Duluc (cap.), Cheyrou et Mauvrit. Remplaçants : M.Pigagnol, Marty, Auzou, Perreti, Chenu, Magnol et Y.Piganol.
SAINT-GIRONS : M.Parenti, Pons, S.Desbiaux, Jaen, Bringue, N.Desbiaux, Labert, Heymans (cap.), Lazerges, Dissegua, Roussel, Dariaux, Durrieu, Collado-Sanchez et J.-C. Parenti. Remplaçants : Marcellin, Geraud, Hernanndez, Rietbrock, Bouin, Dirgorio, Jo Parenti
Le Rugby Club Revélois tient à féliciter Saint-Girons pour ses deux titres, amplement mérités.