La semaine dernière, le Saint-Jean-de-Luz Olympique a annoncé la fin de carrière de son 3ème ligne, Gabriel Souverbie. Passé par la Section Paloise et Nice, le joueur de seulement 22 ans a en effet pris cette décision pour préserver sa santé, après avoir subi des commotions à répétition depuis 2017. Il revient sur les raisons de ce choix fort, la gestion des chocs à la tête dans le rugby, et sur ce qui l’attend désormais…
« Je savais bien que je ne jouerai pas jusqu’à 32 ans. »
Votre club a annoncé récemment votre retraite rugbystique. Tout d’abord, comment allez-vous et quand avez-vous réellement pris cette décision ?
« Ça va très bien, merci. J’ai cette réflexion depuis le match de la saison dernière contre Lannemezan, le 2 avril, car j’ai pris un KO. Il ne paraissait pas très impressionnant, mais m’a causé des maux de crâne pendant deux semaines. J’ai donc eu 15 jours d’arrêt de travail et j’ai dû rester dans le noir, sans musique. J’ai bien essayé de sortir une fois, déjeuner avec mes amis à la foire du jambon à Bayonne, mais je n’ai tenu que deux heures dehors, c’est dire. C’est à ce moment que je me suis promis que j’arrêterais sûrement au prochain KO. Il est arrivé plus rapidement que prévu, dès le quatrième match de la saison, à Marcq-en-Barœul. »
C’était donc plus le fruit d’une réflexion personnelle, que de l’obligation d’un médecin ?
« C’est ça oui, mais j’ai quand même fait toute une batterie de tests avant de me décider. J’ai bien évidemment fait un bilan neurologique, un IRM des cervicales et un IRM du cerveau. En septembre, un neurologue m’a aussi demandé de faire un électroencéphalographe. Les résultats étaient tous plutôt bons, mais un autre spécialiste s’est montré plus alarmiste. Il m’a bien expliqué que je ne pourrai pas subir des commotions éternellement. Logiquement, étant donné que je n’ai que 22 ans et que je joue 3ème ligne, je savais bien qu’avec mon historique, je ne jouerai pas jusqu’à 32 ans. »
Justement, avant ces deux gros chocs, combien en aviez-vous subi ?
« Un bon nombre malheureusement. Déjà en junior à Pau, j’ai dû être KO 3 fois dans la saison, puis à nouveau 2 ou 3 fois avec le groupe pro. Ensuite, assez étonnamment, je n’ai rien eu pendant deux ans. J’en avais presque oublié la possibilité, mais le match de Lannemezan me l’a vite rappelé. »
« Il faut surtout s’écouter, car la santé reste primordiale. »
Malgré tout, on imagine que la décision finale a dû être très difficile à prendre ?
« Oui et non, car je joue au rugby depuis l’âge de 4 ans, mais je n’en vis pas aujourd’hui. En parallèle, je suis étudiant en Master 2 et alternant au Crédit Agricole, donc arrêter le rugby ne chamboule pas totalement ma vie. »
Tant mieux, et comment le Saint-Jean-de-Luz Olympique vous a-t-il accompagné dans ce choix ?
« Vraiment très bien. Après le match à Marcq-en-Barœul, je suis allé à l’entrainement du mardi pour me tester, même si je ne me sentais pas bien et j’en ai parlé aux coachs. Ils m’ont immédiatement expliqué que je ne jouerai pas la fin du bloc, et que je devais en profiter pour réfléchir à ma décision. Ils m’ont bien précisé qu’ils pourraient me conseiller, mais que ça devait rester un choix personnel. Quelques jours plus tard, j’ai appelé Serge Millas (l’entraîneur principal) pour lui annoncer que j’arrêtais, et il a été très compréhensif. »
Avec votre expérience, qu’est-ce que vous conseilleriez aux autres joueurs, qui connaîtraient également beaucoup de commotions, et à leurs clubs ?
« Je leur dirai qu’il faut surtout s’écouter. Sur le terrain, tu caches forcément un peu que tu n’es pas bien, car tu veux continuer le match. Donc, les entraîneurs ne peuvent pas forcément le voir. Même médicalement, il peut ne pas y avoir de traces ou de signes visibles du choc. C’est donc aux joueurs eux-mêmes de bien écouter leur corps et de ne pas se mettre la pression pour rejouer au plus vite. La santé reste primordiale. »
« L’appel du rugby reviendra vite »
Comment allez-vous remplacer le terrain désormais ?
« Je ne me fais pas trop de souci pour ça. Je m’épanoui pleinement à l’école et dans mon alternance, donc j’ai déjà d’autres choses sur lesquelles me focaliser. Surtout, je compte bien profiter du Pays Basque et de mon nouveau temps libre, pour faire plein d’activités. Je joue déjà à la pala avec des amis, et je réfléchis même à commencer le surf (sourire). Aussi, je viens de la vallée d’Ossau, donc je vais aussi pouvoir enfin me remettre à la montagne. Bien sûr, je ne reste pas loin de mes coéquipiers et je continue de les voir souvent. »
Et un retour dans le rugby ?
« Pas pour tout de suite en tout cas. Mais je reste un passionné et je sais que l’appel du rugby reviendra bien vite. Il y a plein de manières de revenir, que ce soit dans l’administratif, dans un staff, ou même comme éducateur. Je trouverai facilement, ne vous inquiétez pas (sourire). »