Très loin des lumières du Tournoi des VI Nations, juste pour le plaisir de jouer et de se retrouver, il y a le rugby amateur, au sein duquel se cache des passionnées. Celles qui découvrent le ballon ovale depuis peu, et qui le pratiquent dans un championnat territorial géolocalisé. Ces jeunes et moins jeunes, font du X. Enfin du 10 pour celles et ceux qui n’auraient pas compris le chiffre romain à la première lecture. Ne souriez pas, c’est du vécu. Coup de projecteur sur un match, particulier, et symbolique…
A Briatexte, tout est parti d’une d’une discussion un soir de fête du village : « Et pourquoi pas monter une équipe féminine après tout ? » Quelques semaines et une entente avec le grand voisin graulhétois plus tard, les Lionnes du sud tarnais venaient de naître. Dimanche dernier, la Saint-Valentin approchant, jouer en lever de rideau d’un match de Nationale 2 à Noël Pelissou, théâtre d’exploits glorieux dont les Guy Laporte et Daniel Revailler ont été et resteront les têtes de proue du rugby graulhétois, était donc déjà une belle initiative en plus d’une juste récompense.
Cette première, hasard du calendrier, offrait une opposition en forme de derby, contre Carmaux. En effet, l’US Carmaux, vainqueur du Brennus en 1951, a été le premier club tarnais à créer une équipe féminine. C’était en 1969. Celles qui seront surnommées les pionnières, et pour cause, devront malgré tout ranger leurs crampons cinq ans plus tard.
Il aura donc fallu attendre un demi siècle pour que des nouvelles pionnières voient le jour. Elodie Durand-Quintard, l’actuelle et dynamique présidente de l’USC, n’est évidemment pas étrangère à cette symbolique renaissance, soutenue par une célèbre carmausine, 3ème ligne du XV de France féminin : Gaëlle Hermet.
Le match
Dès l’échauffement sur le terrain annexe, les joueuses des deux formations sont à l’écoute des entraîneurs, studieuses, appliquées, motivées. On fait monter les corps en température, on répète des lancements de jeu. Au moment de s’en retourner vers les vestiaires, bras dessus, bras dessous, les regards deviennent subitement plus sombres. L’heure du grand rendez-vous va sonner.
Il est 13h30, les joueuses entrent sur le terrain d’honneur, devant un public clairsemé. Le froid est saisissant, le ciel arrose ce derby de quelques averses éparses. Le coup d’envoi est donné. Le jeu au pied n’est pas la qualité première du jour, les renvois ne font pas toujours dix mètres, les transformations, même en très bonne position, non plus. Mais il n’y a pas de pénalité tentée au pied, ce qui rend le jeu plus ouvert, plus spectaculaire aussi.
Car ne vous y méprenez pas, les actrices de cette rencontre, de 18 à… beaucoup plus, débutantes pour la plupart, ont bien appris leurs leçons, épaulées par des plus aguerries et expérimentées, trahies par une meilleure technique individuelle. Les coachs, plus éducateurs qu’entraîneurs d’ailleurs, ont manifestement insisté pour qu’il y ait de la continuité dans le jeu. Et ça marche !
Les fondamentaux sont bien respectés également : conquête, placement, plaquage, grattage, variété des combinaisons, tout y passe. L’envie, la cohésion et l’état d’esprit de ces demoiselles et dames (N’insistez pas, on ne donnera pas l’âge de ces quelques quadras) est exemplaire. Car jouer à 10 sur un grand terrain demande du coffre, justifiant un découpage en trois tiers temps de 20 minutes.
On ne joue pas à l’économie, on s’envoie même sans retenue, avec les bobos qui vont avec. Une cheville qui tourne par ci, un genou par là, un pet dans le nez dans un regroupement, une bosse sur la tête, autant de maffrées à qui on extrait quelques larmes de douleur.
Rapidement effacées par les premiers soins d’entraîneurs décidément polyvalents, porteurs d’eau et de nouvelles rassurantes, mais aussi de civières. Un médecin dans la tribune descend pour apporter son premier diagnostic. Une blessure plus grave, nécessitera la venue des pompiers.
Le jeu reprend. Les bancs de touche se muent en véritables kop d’ultras. Chaque arrêt de jeu est propice à donner des conseils, à s’encourager, à rester soudées. Chaque avancée, chaque percée, et évidemment chaque essai, sont accompagnés d’applaudissements nourris, d’accolades, et de clins d’oeil de satisfaction.
Elodie Durand-Quintard, la présidente de l’US Carmaux, présente au bord du terrain, souffre avec son équipe qui encaisse des essais, mais salue le courage et la volonté de ses protégées qui vont sauver l’honneur. Qu’importe cette défaite du jour, et les autres, qu’importe la dernière place au classement, la création de cette équipe féminine carmausine est la plus belle victoire.
A l’image de l’entente féminine entre Briatexte et Graulhet. Au coup de sifflet final, les sourires sont nombreux. Len entraîneurs font un petit discours, remercient et félicitent « leurs filles ». Une photo de groupe est orchestrée pour immortaliser cet instant.
Ah oui, on avait oublié de vous dire : Charline, notre Miss RugbyAmateur 2024 joue à Briatexte. L’occasion pour nous de lui remettre une casquette officielle, en plus de son magnifique weekend dans les Pyrénées offert par Book&Go (instant pub).
Charline était ravie, malgré un coup involontaire mai très douloureux, reçu sur le nez, et oui, c’était bien elle. Comme quoi, on peut être Miss et rugbywoman, que les choses soient bien claires ! « Mais ça fait mal quand même ! » sourit Charline, avec ses drôles de dames autour.
On nous signale dans l’oreillette que nous n’avons pas précisé le score. Le score ? « Bria » a gagné, mais on le répète, l’important est ailleurs. Comme à l’école des fans, tout le monde a gagné. C’était même et plutôt l’école des femmes, l’école du rugby féminin. Qui donne de bien belles leçons… de vie.