Après une longue coupure pour cause de Tournoi des Six Nations, une opposition des plus capitales pour l’accession aux demi-finales du Top 8 féminin se tenait ce weekend sur la pelouse du Stade Ernest-Wallon. En effet, les filles du Stade Toulousain (4ème, 38 points), qui restaient sur deux victoires consécutives, recevaient le Montpellier Hérault Rugby (3ème, 40 points) et son armada d’internationales, vice-championnes de France en titre et poids lourd de l’élite française depuis de nombreuses saisons. De plus, nul ne doute que les Montpelliéraines avaient certainement encore en tête la courte défaite subie à domicile lors du match aller (14-15). De quoi donner à cette rencontre une odeur et une intensité de phases finales… (par Marco Matabiau – Photos Pamisire).
Les Stadistes avaient à cœur de bien démarrer la rencontre. Elles le démontraient en bousculant le pack montpelliérain sur les deux premières mêlées. Sur la seconde, les Toulousaines obtenaient une pénalité et optaient pour la touche. Dans la foulée, la centre Fregier déchirait le rideau défensif et retrouvait Hermet à hauteur, mais l’action avortait à quelques mètres de la ligne. Ce n’était que partie remise puisque, à la 7è, les rouge et noir allaient ouvrir le score sur une action d’école: point de fixation au milieu du terrain puis enchainement côté gauche. Le ballon passait de mains en mains pour finir entre celles de l’ailier Bertrand, décalée à la perfection par son arrière Escande. L’essai était imparable. Avec la transformation d’Imart, le Stade prenait le score (7 – 0). Les visiteuses avaient toujours autant de mal à entrer dans le match, comme en témoignaient les deux premiers lancers en touche de la capitaine Mignot, pourtant expérimentée et aguerrie aux joutes tant nationales qu’internationales (39 sélections au compteur). Pour ne rien arranger, le pilier Benzid, touchée à la cheville, devait quitter prématurément ses camarades. Elle était remplacée par Ceravolo. Néanmoins, Montpellier réagissait enfin et commençait à tenir le ballon. Sur une belle séquence, amorcée par l’arrière Boujard côté droit, une pénalité était accordée aux Héraultaises pour un hors-jeu de ligne. Des 35 mètres en bonne position, Peyronnet (dont la sœur jumelle était la capitaine toulousaine du jour) transformait: 7 – 3 (17è).
Le jeu s’équilibrait et on assistait au milieu du terrain à un superbe duel entre les deux paires de centres, Coutouly et Fregier (Toulouse) se rendant coup pour coup avec Poublan et Peyronnet. Montpellier devait à nouveau réorganiser son paquet, puisque Le Bian sortait elle aussi blessée. Ikpefan faisait son entrée en seconde ligne et Flaugère passait à droite. Cela n’empêchait pas les bleu et blanc de maintenir la pression, le jeu s’organisant autour de la troisième ligne N’Diaye, tantôt perforatrice, tantôt à la distribution. A la 33è, on assistait à un des tournants du match: l’arrière montpelliéraine Boujard écopait d’un carton jaune pour avoir plaqué en l’air son homologue Escande (selon les dernières informations, elle ne souffrait pas de fracture, « juste » de contusions). Cette dernière quittait le terrain sur civière et était remplacée par Pegot. Suite à cet incident, le rythme baissait quelque peu et la mi-temps était donc sifflée sur le score de 7 – 3 en faveur des Toulousaines.
Montpellier contrôle et verrouille
Dès la reprise, on voyait une équipe de Montpellier beaucoup plus conquérante et précise dans ses enchainements. Peyronnet concrétisait ce bon début d’une belle pénalité des 35 mètres: 7 – 6 (46ème). Dix minutes plus tard, la Toulousaine Fregier écopait d’un carton blanc. Les Montpelliéraines choisissaient la pénal touche et imposaient la puissance de leur pack pour envoyer la capitaine Mignot derrière la ligne: 11–7 (57è). Les rouge et noir ne voulaient pas voir le match leur échapper et faisaient le forcing sur la ligne d’en-but visiteuse pendant de longues minutes, mais la défense adverse faisait le dos rond et tenait bon, obtenant même une mêlée à la fin d’une interminable (et certainement fort éprouvante pour les organismes à cet instant du match) séquence. Dans les cinq dernières minutes, Toulouse allait de nouveau jouer son va-tout mais Montpellier s’appuyait toujours sur sa défense hermétique, s’adjugeant ainsi un succès primordial dans la course au dernier carré.
En effet, avec cette courte victoire, les Montpelliéraines ont montré que l’expérience accumulée au cours des saisons précédentes pesait dans les moments clés d’un match indécis. Elles sont assurées de finir dans les quatre premières du championnat et donc de participer aux demi-finales. Pour leur part, les Toulousaines empochent certes le point de bonus défensif mais peuvent se montrer quelque peu déçues si l’on en juge de l’investissement et du contenu proposés ce dimanche. Elles iront jouer leur qualification (elles sont à la lutte pour la quatrième place avec Rennes) la semaine prochaine à Blagnac dans un derby qui s’annonce d’ores et déjà explosif.
LES REACTIONS
Olivier Clessienne (Entraîneur, Montpellier): «Un début de match difficile car on est rapidement menés au score. Toulouse nous a posés beaucoup de problèmes car elles tenaient énormément le ballon. On n’était pas forcément très bien en place en début de match sur nos systèmes défensifs (…) Après, on repart avec deux piliers blessés. Ça va évidemment compter pour la fin de la saison parce que c’est dur de remplacer ce genre de joueuses.»
Patrick Raffy (Entraîneur, Montpellier): «En milieu de première période on a enfin réussi à scorer. On a un peu plus occupé tout de suite après la pause. Notre mêlée a retrouvé un peu d’allant. En revanche, on fait une fin de match à l’arrachée, on joue dans notre camp alors qu’on doit utiliser davantage le jeu au pied. On fait une grosse séquence défensive qui fait, selon moi, que l’on gagne ce match (…) C’est le premier match de la saison que l’on jouait avec l’effectif complet, et avec toutes les blessées que l’on a, c’est peut-être le dernier. On va essayer de rafistoler tout ça. En attendant, ce soir, on savoure ce succès.»
Pierre Marty (Entraîneur, Toulouse): «Un match qui se joue à très peu. Beaucoup d’investissement, d’application et d’engagement de notre part. On est peut-être encore un peu tendres sur les moments clés même si on a beaucoup progressé. Face à une telle équipe avec des filles plus expérimentées que nous, ça se ressent. On rentre très bien dans le match que ce soit sur les intentions ou sur le volume de jeu produit. Après on perd notre arrière avec une sanction pour la joueuse adverse qui m’apparaît pour le moins clémente. A mon avis, puisque notre joueuse n’a pas pu reprendre le jeu, le carton aurait pu être rouge. On perd à ce moment-là un élément fort de notre jeu, même si la fille qui est entrée n’a pas démérité. Ça nous met un petit coup derrière la tête. Tout cela mis bout à bout fait que l’on est déçus. Après on prend quand même un point. Il peut compter d’ici à la fin. Dimanche prochain, on va aller ferrailler à Blagnac et faire en sorte que la saison ne soit pas terminée après le match.»
Gaëlle Mignot (Talonneur, Montpellier): «On s’impose certes, mais on fait une entame difficile. On s’est mises en difficulté d’entrée de jeu en encaissant un essai. Après on voulait vraiment se prouver qu’on était capables de faire quelque chose. On a tenu jusqu’au bout, c’est bien là l’essentiel. On l’emporte après un match compliqué, c’est de bon augure pour la suite puisqu’on a montré qu’on était capables de rien lâcher jusqu’au bout. Sur la grosse séquence défensive sur notre ligne, je pense qu’on prend un ascendant psychologique. On arrive à les repousser. Ça nous met en confiance, on sait que le groupe est fort. Là, il nous reste un match. L’objectif était de se qualifier. On a eu une saison difficile avec des hauts et des bas. Ce soir, on est sûres d’être dans les quatre. Maintenant, forcément, on ne va pas galvauder le match de la semaine prochaine à domicile face à Rennes, qui viendra jouer sa qualification. On veut aussi bien terminer pour attaquer les phases finales dans les meilleures conditions possibles.»
Juliette Fregier (Trois-quart centre, Toulouse): «On a livré un bon match, mais le problème, c’est qu’on a du mal à concrétiser dans nos temps forts. On fait ce qu’il y a à faire, puis les dernières passes, les derniers mètres, on ne se trouve pas, on ne fait pas les bons choix ou on est en retard au soutien. On fait le plus dur et à la fin, on se trompe. C’est dommage. On savait que leur point fort se situait devant. Leur ligne de trois-quarts nous est supérieure, plus rapide, plus perforante. C’est une équipe très complète. Maintenant on va aller à Blagnac chercher la qualification au-delà du derby, même si l’ambiance «derby» aura aussi son importance. C’est un match que l’on attend avec impatience et sur lequel il faudra pas se louper.»
LA FEUILLE DE MATCH
A Toulouse (Stade Ernest-Wallon): Montpellier Hérault Rugby bat Stade Toulousain 11 à 7 (mi-temps: 3 – 7).
Arbitrage: M. Florian Cormié (Comité Limousin).
Pour Toulouse : 1 essai Bertrand (7è), une transformation Imart.
Pour Montpellier : 1 essai Mignot (57è), deux pénalités Peyronnet (17è, 46è).
Carton blanc : à Toulouse, Fregier (56è).
Carton jaune: à Montpellier, Boujard (33è).
Composition Toulouse : Escande ; Jason, Coutouly, Fregier, Bertrand ; Imart (o), Sansus (m) ; Lecat, Hermet, Peyronnet (cap) ; Loubet, Bobo ; Rière, Divoux, Traoré.
Sur le banc: Laborie, Menetrier, Deschamps, Alaux, Bilon, Galibert, Pegot.
Entraîneurs: Anthony Granja et Pierre Marty.
Composition Montpellier : Boujard ; Banet, Peyronnet, Poublan, Vanthournout ; Amédée (o), Troncy (m) ; N’Diaye, Rayssac, Billes ; Flaugère, De Nadai ; Le Bian, Mignot (cap), Benzid.
Sur le banc: Paret, Ceravolo, Ikpefan, Edoung Abessolo, Teisseyre, Duniach, Berenger
Entraîneurs: Olivier Clessienne et Patrick Raffy.