Le Lot, autant le fleuve que le département, est porteur de belles équipes de rugby, où les féminines s’expriment avec talent, et ce, depuis longtemps. Luzech en est un fer de lance, avec une présidente (Ghislaine Rossignol) et des filles surnommées les « Infernalles », avec deux « ailes » oui. Dimanche, elles recevaient Romagnat, leader invaincu. Par un froid polaire, les actrices de cette partie ont offert un beau spectacle, et un scénario de match à peine croyable. Menées 0-12 à dix minutes du terme, on ne donnait pas cher des chances des Luzéchoises. Et pourtant, un premier essai redonnait l’espoir, et la rage d’aller chercher une victoire improbable. A grands renforts de volonté et d’énergie puisée dans les réserves, et après plusieurs pénalités jouées à la main, les riveraines du bord du Lot, se voyaient octroyer un essai de pénalité à la 81ème minute. 14-12, victoire ! Une émotion telle qu’Olivier Cot, présent derrière la main courante, décidait d’en extraire la quintessence à travers un texte qui méritait d’être publié. Les photos d’Amandine VERNHIÉ, joueuse reconvertie derrière l’objectif, aussi…
« J’ai vu l’homme en vert siffler le coup d’envoi d’une rencontre où le rouge et le blanc allaient s’entrechoquer avec le jaune et le noir sous un ciel définitivement gris.
J’ai vu des filles souffrir sans jamais desserrer les dents. J’ai vu des filles plier, mais jamais ne rompre.
J’ai vu 40 premières minutes d’investissement total ayant donné du sens au mot espoir.
J’ai vu des supporteurs, des parents, des joueurs, des anciens, des habitués, des nouveaux et des partenaires se dire de concert « il y a la place ».
J’ai vu toute l’incrédulité sur des visages meurtris par les ravages d’une maudite interception.
J’ai vu se dessiner toute une nuée de « c’est pas grave » sur les visages d’anges presque déchus.
J’ai vu la tour de l’Impernal s’écrouler au gré d’une charge monstrueuse, sortie tout droit d’une ancestrale activité des volcans d’Auvergne.
J’ai vu des filles à genoux puis debout, expliquant à qui voulait l’entendre que le mot impossible n’existait pas dans le dictionnaire luzechois.
J’ai vu un soupçon de soulagement lorsque la benjamine de l’équipe finissait d’enfouir la gonfle au plus profond de l’en-but jaunard.
J’ai vu de la fumée sortir d’un appareil photo, d’une fille emmitouflée sur le bord de touche, qui n’avait trouvé comme seul moyen de se réchauffer que de mitrailler.
J’ai vu le boulanger de la commune m’expliquer toutes les vertus de la prédiction ainsi que le génie de Nostradamus.
J’ai vu tout d’un coup, l’arbitre, galoper gentiment vers le milieu des perches en levant le bras…….
J’ai vu le temps s’arrêter. J’ai vu des étreintes jusqu’alors inconnues au bataillon des luzechoises.
J’ai vu toutes les couleurs de ces jolis yeux inondés de larmes d’un bonheur tellement profond, qu’il contamina l’ensemble des tribunes.
J’ai vu des anges ressuscités et touchés par la grâce se serrant les uns contre les autres afin d’écouter l’évangile selon Saint Pilou-Pilou.
J’ai vu des entraîneurs heureux et apaisés malgré les remords d’un discours un peu brutal, qui n’avait pour but que de tirer toute la quintessence de ce qu’il y avait de mieux dans ce groupe.
J’ai vu des filles et des femmes respectables, respectées et respectueuses envers elles même.
J’ai vu à quel point j’avais de la chance de côtoyer ces nanas capables de vous faire traverser des émotions parfois inavouables pour un homme.
J’ai vu un vrai groupe, dans un vrai club. Bref… j’ai vu des filles jouer au rugby !