Manon ANDRÉ, éducatrice socio-sportive à Rebonds! et Marjorie MAYANS, marraine de l’association, toutes les deux joueuses au Blagnac Saint Orens Rugby Féminin et internationales à XV, se sont prêtées au jeu de l’interview croisée. Elles nous parlent de leur expérience vécue pendant la coupe du monde, de leur vie de joueuses de rugby et de leur club. Enfin, elles reviennent sur leur engagement à Rebonds!
La Coupe du monde
Votre meilleur souvenir ?
Marjorie MAYANS : L’ambiance qu’il y a eu dans le groupe, la solidarité entre les filles. J’ai vécu une aventure extraordinaire avec des filles supers. Elles sont devenues des amies proches. Le monde qui est venu nous encourager aussi à Marcoussis et à Jean Bouin, c’était magique.
Manon ANDRÉ : Le 2ème match contre les sud-africaines, je commence la compétition à ce moment-là n’ayant pas joué le premier match. Titulaire en 7 je me régale sur le terrain, il y a du monde, les médias commencent à vraiment s’intéresser à nous. On reçoit plein d’encouragements de nos proches mais aussi sur les réseaux sociaux. Là on se dit que cette coupe du monde peut être un tournant pour le rugby féminin et que l’événement va être encore plus sensationnel que ce à quoi l’on s’était préparée depuis 4 ans.
Votre plus mauvais souvenir ?
MM : L’essai qu’on prend contre le Canada en arrivant sur le terrain après la mi-temps lors de la demi-finale. Nous passons à côté du match pendant dix minutes. Cela ne pardonne pas, et ça nous coûte une finale de Coupe du monde.
MA : La défaite contre les Canadiennes et notamment ces dix minutes où l’on prend deux essais d’affilée, et où l’on manque d’en prendre un troisième !
Une anecdote ?
MM : Après le match du Canada, quand nous sommes rentrées à Marcoussis, des mots d’encouragement de l’équipe d’Espagne étaient accrochés partout dans les couloirs, les escaliers, sur les portes de nos chambres. Ça nous a vraiment redonné le sourire, et remotivé.
MA : Notre passage à Stade 2 en direct où l’on nous briefe pour l’entrée en scène « à « action » vous criez et applaudissez ». Une joueuse a cru que le signal était donné et elle s’est mise à hurler et applaudir toute seule en nous regardant avec de gros yeux… Fou rire général, surtout quand il s’agit d’une fille très discrète dans la vie de groupe !
L’après Coupe du Monde : le retour en Midi-Pyrénées
MM : Après cinq jours de repos, j’ai enchaîné sur un stage à l’INSEP avec le rugby à 7. Puis je suis rentrée à Toulouse pour le stage de début de saison avec mon club, le Blagnac Saint-Orens Rugby Féminin. Je suis repartie à Hong Kong dix jours pour le tournoi de qualification du circuit IRB pour le mondial Seven. Je pensais avoir un peu de mal à gérer le fait de repartir encore, mais tout s’est très bien passé et j’ai retrouvé beaucoup de filles du rugby à quinze. Je prépare le prochain tournoi à Dubaï en espérant être qualifiée. Ainsi que pour tous les autres tournois du circuit mondial dont Sao Paulo, Atlanta et Londres. L’objectif est de finir dans les quatre premières pour être qualifiées d’office pour les Jeux Olympiques de Rio en 2016. En parallèle, je passe un Master 2 Sciences Politiques, option politique et sécurité à Toulouse.
MA : Retour à la vie normale, reprise des entraînements avec le club et du travail. Au début c’était un peu « flou », j’étais encore plongée dans les souvenirs de la Coupe du monde . On ne tourne pas la page de quatre ans de préparation comme ça. Les gens que l’on croise nous en parlent encore et même en club nous avons plus de supporters et de sollicitations. Au club du BSORF, les joueuses sont impliquées et nous sommes presque soixante-dix aux trois entraînements de la semaine. Nous allons engager une troisième équipe sénior à VII. L’effet coupe du monde est là. Nos coéquipières se voient elles aussi valorisées et encouragées par l’engouement qu’il y a eu cet été pour le rugby féminin.
Un engagement commun : l’association Rebonds!
MM : Je n’ai pas hésité une seconde à accepter de parrainer l’association quand Manon me l’a proposé, même si au niveau de mes disponibilités cela m’est difficile d’être présente régulièrement. Je pense que le rugby est un sport qui peut apporter beaucoup de choses à ces jeunes, par ses règles et ses valeurs, mais aussi par la manière dont il est enseigné. Il permet de donner un cadre à ces jeunes en difficulté. Je parraine le projet l’Essai au Féminin. Dans les quartiers le rugby féminin n’est pas très développé, alors qu’il apporte tout autant aux filles, qu’aux garçons. Je trouve important de permettre l’accessibilité de cette pratique aux jeunes filles des quartiers. Moi-même j’ai commencé le rugby à 9 ans. Mon frère en faisait et il y avait déjà une fille dans son club donc ça m’a donné envie d’essayer et je n’ai jamais arrêté.
MA : Je suis salariée depuis 6 ans en tant qu’éducatrice socio sportive, en charge du projet l’Essai au féminin et des interventions en temps péri et extrascolaire. Le projet est riche et l’expérience que j’ai pu acquérir me donne envie d’aller plus loin et de pouvoir étendre nos interventions au-delà de l’agglomération toulousaine. Moi-même issue du milieu rural je n’ai eu qu’un accès limité au sport lorsque j’étais enfant. Si j’ai pratiqué des activités en club c’est parce que mes parents étaient sportifs et qu’ils m’ont incité. Ce n’est pas le cas dans toutes les familles. Nous souhaitons pouvoir développer l’antenne « Arièges – Comminges » pour tenter d’apporter des solutions aux problématiques de mobilité dans le milieu rural et d’accessibilité à la pratique sportive pour tous. L’idée est de pouvoir proposer des cycles éducatifs rugby dans les établissements scolaires, péri et extra-scolaire, ainsi que les structures spécialisées. Ces interventions nous permettront de créer du lien avec les jeunes et aider les plus en difficulté à jouer en club. Nous travaillons sur ce projet depuis quelques mois et depuis mon retour de la coupe du monde, je rencontre les acteurs de ces territoires afin de leur présenter le projet et d’envisager de nouveaux partenariats.
Propos recueillis par Mona Lisa