A l’heure de la tarte de mamie du dimanche après-midi, vous prendrez bien une part de derby pour 15h30 ? A 17h00, qui allait manger la cerise sur le gâteau posé sur la pelouse du stade Jean-Fleury ? Telle est la question bien alléchante de ce duel tarn-et-garonnais entre le SC Nègrepelisse et le CA Castelsarrasin. Mais au-delà de la suprématie départementale, ce duel de clochers est à deux vitesses dans le championnat : entre les Diables Rouges de Nègrepelisse qui végètent au pied du fameux clocher et les Castelsarrasinois qui eux, sont à quelques marches du sommet d’où l’on voit, par-delà les collines de la saison régulière, l’horizon doré des qualifications (à la lutte avec Cahors et Villefranche-de-Lauragais pour être dans les quatre premiers). Alors, que vous aimiez la tarte de mamie ou le gâteau du derby avec sa cerise au sommet, l’affiche du jour était alléchante, le tout parfumé d’odeurs de cuir et de camphre, doré au beurre d’oeil noir. Reste à savoir qui mangera gâteau et la cerise, et qui aura les miettes dudit gâteau… (résumé et photo par Mister Wildon)
De la bouche même du coach de Castelsarrasin, « Mouss » Garioub (voir les réactions plus bas), lui-même ancien technicien de Nègrepelisse la saison dernière, les joueurs du CAC se savaient attendus. Logique en soi : pour vivre et survivre en Fédérale 2, les Diables Rouges n’ont d’autre solutions que de battre le rival castelsarrasinois. Dans un stade copieusement garnis de spectateurs aussi courageux que les joueurs pour affronter un temps plus que détestable, le derby va cependant vite passer au second plan face aux préoccupations comptables des deux équipes.
Entreprenants, les Nègrepelissiens font le jeu, comme prévu, et s’emploient à monter des offensives malgré une pelouse déjà en souffrance, largement labourée par le match des réserves en lever de rideau. C’est au pied que Nègrepelisse ouvre le score, Barres passant victorieusement une pénalité vent debout (12e, 3-0).
Malgré leur résolution et leur volonté, les joueurs d’Amédée Domenech se heurtent au « mur noir » de Castelsarrasin et ne parviennent pas à creuser la brèche par où s’engouffrer. Mais sur la première vrai poussée adverse, les visiteurs obtiennent une poussée que Gendre se fait fort de balancer entre les perches (32e, 3-3). Match nul, la belle au centre. Lentement mais sûrement, « Castel » appuie sur l’accélérateur et quelques minutes avant la mi-temps, dans une attaque irrésistible en diagonale, partie côté droit, le pilier Bousignac enfonce la dernière ligne de résistance rouge et blanche pour marquer un essai en force que Gendre bonifie sans difficulté (36e, 3-10).
Nègrepelisse réagit vite et bien face à ce coup du sort et parvient même à obtenir une pénalité. Lointaine et toujours face à vent, la tentative de Barres ne trouve pas les perches et laisse passer l’occasion de recoller au score à l’heure des oranges.
Bertrand douche les espérances de Nègrepelisse
Dès l’entame du second acte, Castelsarrasin refroidit (littéralement cette fois) tous les espoirs des Diables Rouges. Sur une attaque parfaitement montée et une ouverture « grand large » côté gauche, Bertrand prend l’intervalle et, en jambes, fait son festival de cannes en sprintant jusqu’à la ligne d’essai sans aucune résistance. Gendre en rajoute une couche en transformant l’essai (49e, 3-17).
Face au calme froid et réaliste de Castelsarrasin, les joueurs d’Amédée Domenech vont doucement mais sûrement reculer, subir et se déliter dans leur défense. Et si la pelouse est la même pour tous, la mêlée « noire » fait un mal de chien à son homologue qui recule et plie sous l’impact. C’est juste sur cet exercice de style que « Castel » enfonce froidement et définitivement le clou.
Les Diables Rouges à genoux…
Alors que les joueurs de Mustapha Garioub avancent sûrement mais lentement sur la ligne d’essai adverse, Dumail, au cul de la mêlée, n’ouvre pas le jeu à gauche ou à droite, pique le cuir et file droit entre les barres sans aucune résistance, toute la ligne de défense nègrepelissienne étant aspirée sur le petit côté. Le bluff est parfait, le hold up royal et le réalisme castelsarrasinois récompensé. Gendre expédie sa transformation sans aucune difficulté, Nègrepelisse est à genoux et ne s’en relèvera pas (68e, 3-24) malgré cinq dernières minutes très offensives et qui ne seront récompensées par aucun point.
Sur une surface de jeu à la limite du praticable, patinoire à souhait, un ballon savonnette et des appuis incertains, les deux équipes ont offert certes un derby dont on ne se souviendra pas dans dix ans ou dans un demi-siècle mais plutôt un rugby valeureux et courageux. Force reste cependant au classement général : Castelsarrasin s’offre une huitième victoire de rang tandis que Nègrepelisse encaisse une septième défaite consécutive. Et tout aussi froidement, le CAC fait le plein (points de victoire plus le bonus offensif) et regarde vers le haut tandis que les Diables regardent vers le bas et l’enfer qui s’ouvre sous leurs pieds…
Les réactions
Amédée Domenech, entraîneur de Nègrepelisse
Rugby Amateur : On a senti votre équipe appliquée, concentrée, notamment en première période, avant de sentir que ce même jeu vous échappait progressivement. Comment l’expliquez-vous ?
AD : En première mi-temps, le vent nous a facilité les choses. On a su conserver le ballon, on les a fait douter, avec une bonne défense, haute et agressive. Après, il faut reconnaître que Castelsarrasin est une belle équipe et qu’elle a su faire le dos rond. Ils se sont beaucoup nourris de nos fautes.
RA : Castelsarrasin était intouchable ?
AD : Ils sont venus ici avec des ambitions. C’est normal au vu du classement, de leurs aspirations et de leur groupe. On ne peut pas les jouer ainsi, nous, les « petits paysans » contre une principauté (sic). Aujourd’hui, ils ont des grandes stars (re-sic). Maintenant, humainement parlant, on fait bloc. On n’avait pas « coché » ce match. Le nôtre sera dans deux semaines quand on va aller à Malemort.
RA : Ce match sera comme une « finale » pour vous ?
AD : Oui, tout à fait, ce sera une finale pour le maintien. On a fait une grosse bêtise contre Malemort, à l’aller, en perdant dans les arrêts de jeu. Maintenant, il faudra se battre jusqu’au bout et jusqu’au dernier match pour s’en sortir.
Mustapha Garioub, manager de Castelsarrasin
Rugby Amateur : Au-delà même du derby, on a senti votre équipe appliquée, tout en maîtrise plutôt qu’avec la folle envie d’emballer le match. C’est seulement une impression ?
MG : Il nous fallait construire notre jeu, construire petit à petit notre victoire. Depuis plusieurs dimanches, on a un banc qui nous permet de faire la différence à chaque fois. On savait que Nègrepelisse allait tout envoyer en début de match, et c’est ce qu’ils ont fait. En début de match, ils ont été plus agressifs que nous. Mais petit à petit, ils se sont usés à taper contre « un mur » et on a su en profiter quand il fallait.
RA : Cette victoire vous permet de continuer à regarder vers le haut. C’est plutôt bon signe, non ?
MG : C’est clairement notre objectif depuis le début de saison, et il n’a pas changé. L’essentiel est de gagner, on ne se préoccupe pas des autres. Il nous faut enchaîner les matches et les victoires pour remplir notre contrat : être dans les quatre premiers.
LA FEUILLE DE MATCH
A Nègrepelisse (Stade Jean-Fleury) – SC Nègrepelisse – CA Castelsarrasin 3-24 (Mi-temps : 3-10) – Arbitre : Mr Guillen, assistés de Mrs Diaz et Lasnavères
Pour Nègrepelisse : une pénalité de Barres (12)
Pour Castelsarrasin : trois essais de Boursignac (36), Bertrand (49) et Dumail (68), trois transformations (36, 49, 68) et une pénalité (32) de Gendre
Nègrepelisse : Ducasse, Lopes, Allaire-Snela, Lacassagne, Santerre, Ricco, Este (cap), Beaudonnet, Bounaudet, Le Palud, Folghera, Luans, Rous, Burghofer, Barres. – Remplaçants : Spychala, Prax, Malby, Dellamaria, Prunes, Husson, Colliard.
Castelsarrasin : Boursignac, Crubile, Benlebbad, Capezzone-Saed, Razmadze, Quézel, Gorcioaia, Laborie, Dumail, Dunlop, Limbert, D’Antona, Bertrand, Lavergne, Gendre (cap) – Remplaçants : Yzabel, Lombard-Puret, Limouzin, Boué, El Quassaoui, Mariner, Reymond.
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