Comme à chaque fin de saison, il y a des crampons qui sont raccrochés, définitivement. Un moment toujours difficile, plus ou moins dicté par l’âge et les courbatures de plus en plus douloureuses le lundi matin. Fabien Reynes, le deuxième ligne de Saint-Sulpice-la-Pointe, a dû lui, se résoudre à prendre cette décision pour raison médicale. Victime de plusieurs commotions cérébrales, et après avis médical, il lui a été vivement conseillé de ne plus prendre de risques. A 25 ans, il a donc disputé son dernier match dimanche dernier. La sagesse l’emporte, mais n’empêche pas la tristesse de faire surface au jeu des émotions fortes. Son témoignage, touchant, permettra à d’autres joueurs de se reconnaître dans cette retraite anticipée, imprévue, forcée. On ne verra plus le casque rouge du Paul O’Connel tarnais, arpenter les terrains régionaux, mais gageons qu’on le verra dans les tribunes pour encourager ses copains, au Stadium de Toulouse tout de violet vêtu, et qu’on l’entendra lors des 3èmes mi-temps…
« C’était une décision très difficile à prendre. Depuis l’âge de 13-14 ans j’ai encaissé 2 ou 3 commotions cérébrales par saison, j’ai consulté un neurologue au mois de novembre, qui m’a fortement conseillé d’arrêter la pratique du rugby. J’ai tenu à continuer jusqu’à la fin de la saison car je ne voulais pas abandonner mes amis. J’aurais pu quitter les terrains le coeur léger avec un bouclier qui aurait récompensé ce groupe fantastique mais le destin en a voulu autrement ».
Les yeux rougis par l’émotion, palpable, le gaillard se livre sans concession. Aussi, quand on demande à Fabien ce qu’il va retenir de ces années rugby, l’émotion grandit d’un cran, il voit défiler beaucoup de souvenirs, tous positifs : « Je ne garde que de bons et beaux souvenirs de toutes ces saisons. Tout a commencé à Verfeil en 2002, je me revois encore entrer dans le siège du club house, avec assis à une table un homme extraordinaire, Dominique Host, qui allait me faire découvrir ce magnifique sport. J’ai joué mes premiers matchs, rencontré mes premiers co-équipiers : Maxime Garinot, Johan Bensalla, Manuel Host et tous les autres que je n’ai pas oublié. S’en est suivi des saisons à Lavaur avec des entraîneurs marquant tels que Jacques Suquet qui nous a quitté trop tôt l’année dernière, Didier Berton, Dédé Bouasli. Un super challenge perdu en finale sur la pelouse du Michelin de Clermont, un tournoi réussi à Agen, une demie de petit Sud en cadet contre Bézier. Autant de souvenirs qui resteront à jamais gravés ».
« Des anecdotes à la pelle, des soirées mémorables, des larmes de joie, de peine, la frustration, la libération, c’est tout ça le rugby ».
Après un passage chez le voisin gaillacois d’une saison, retour aux sources vauréenes pour finir en Reichel B avec le duo de feu Bernard Pages et Eric Roca, qu’il a retrouvé cette saison à Saint-Sulpice, club dans lequel il aura passé cinq saisons. « Cinq belles saisons, car c’est un club de valeur, mené de main de maître par la famille Tonon. Nous avons connu pas mal de changements en quelques années, passant de la fédérale 3 à la promotion honneur, et de la promotion honneur en fédérale 3 la saison prochaine ». Une trajectoire étonnante en effet avec deux finales du championnat midi-Pyrénées disputées pour autant de désillusions. « Mais je garde une grande fierté d’avoir joué avec des joueurs d’expérience, comme mon grand frère et mon cousin, d’avoir joué également sous les ordres de deux capitaines exemplaires, Stéphane Marty et Ichem Ghanmi fut un énorme plaisir. Je finis sur une très belle saison, encadré par deux bons entraîneurs que sont Renaud Gely et Eric Roca, au sein d’une équipe solidaire, composée principalement de jeunes comme Noyer, Despaux, Vincent et d’autres. Un groupe qui s’est serré les coudes, tout le monde a avancé dans la même direction, accompagné par un public fantastique qui est toujours à 300% derrière ses joueurs. Mon grand regret est et restera de ne jamais avoir soulevé de bouclier avec mes partenaires. Cependant le rugby m’a tellement apporté de bonnes choses, il m’a fait grandir, rencontrer tellement de personnes qui sont devenus mes amis. Des anecdotes à la pelle, des soirées mémorables, des larmes de joie, de peine, la frustration, la libération, c’est tout ça le rugby. Sans oublier tous les bénévoles, dirigeants des différents clubs, ces personnes qui s’investissent tout le long de la saison pour que les joueurs soient mis dans les meilleures dispositions possibles. Le rugby est une seule et grande famille ».
Une famille qu’il n’oubliera jamais…même s’il semble qu’il ait trouvé une famille d’accueil quelque peu différente. On peut le voir en effet dans les tribunes du Stadium de Toulouse, supporter avec enthousiasme le TFC. Nous ne lui en tiendrons pas rigueur, et au contraire, en guise d’hommage à notre façon, nous remettons ci-dessous le lien de son interview décalée mémorable d’octobre 2014. Un grand moment qui arrachera plus de sourires, que de larmes…