Après presque quatre mois d’interruption, le championnat d’Elite 1 Féminine reprenait ses droits le weekend dernier. Et comment mieux redémarrer une compétition que par un « Clasico » entre Toulousaines et Parisiennes ? A domicile, le Stade Toulousain Rugby (2ème de la poule 2, 19 points) souhaitait confirmer les bonnes dispositions entrevues depuis le début de saison (4 matchs, 4 victoires, dont 3 bonifiées) et reprendre la première place de la poule aux Rennaises (20 points, avec un match en plus). Pour sa part, le Stade Français (3è, 5 points) venait sans pression, si ce n’est celle de montrer que l’écart entre les deux équipes n’était pas aussi large que pouvait le laisser entendre le score du match aller (victoire du Stade Toulousain 50 à 10)… (Par Marco Matabiau/Photos Alain Montségur).
Le début de match était équilibré, mais très vite, la mêlée toulousaine prenait le dessus sur son homologue, obtenant une pénalité au quarante mètres que la demi d’ouverture Cabalou n’avait aucune peine à convertir (3-0, 6è). La défense parisienne contrariait les offensives adverses, mettant un maximum de pression sur le porteur de ballon. Les rouge et noir trouvaient une première brèche quand la talonneur Deschamps trouvait la clé de la défense des « Pink Rockets » et s’échappait sur plus de 20 mètres avant d’être reprise à quelques encablures de la ligne. L’action rebondissait côté gauche mais une mauvaise transmission entre l’arrière Vandesteene et son ailier Cartaillac la faisait avorter (12è). La domination toulousaine en mêlée fermée s’intensifiait, permettant à Lecat de s’autoriser un départ aux cinq mètres, mais les Parisiennes faisaient front. Elles ne pouvaient en revanche rien faire lorsque, quelques instants plus tard, Bordes servait Rière sur un deuxième temps de jeu. La pilier faisait parler sa puissance et inscrivait le premier essai des siennes (8 – 0, 18è).
Sur le renvoi, les résidentes d’Ernest-Wallon enclenchaient une action d’envergure. Au sortir d’un ruck face aux barres, Bordes orientait vers Lecat (décidément dans tous les bons coups en ce début de rencontre). La troisème ligne prenait l’intervalle avant de servir son ailier Murie qui, bien que rattrapée par sa vis-àvis, réussissait à servir Fedrighi à son intérieur, permettant à la deuxième ligne de marquer le deuxième essai toulousain (13 – 0, 20è). Le Stade Français tentait bien, par à-coups, de réagir, que ce soit par sa deuxième ligne Viardot, sa troisième ligne Lambare ou sa trois-quart centre Muller. Mais les rose et bleu subissaient un terrible coup d’arrêt à la 30è: grièvement blessée au coude (elle serait conduite un peu plus tard à l’hôpital), la pilier Diaw devait quitter ses camarades. Elle était remplacée par Sade, dont l’entrée ne réglait en rien les problèmes parisiens en mêlée. Sur une nouvelle grosse poussée toulousaine, le ballon était confisquée: Bordes jouait petit côté avec Vandesteene. Cette dernière négociait parfaitement le deux contre un pour servir son ailier Cartaillac, laquelle accélérait et débordait la demie de mêlée Saluzzo pour aller, au bout de quarante mètres de course, pointer en-but (18 – 0, 36è). Le bonus offensif était d’ores et déjà en poche.
Loin d’être rassasiées, les Toulousaines continuaient d’enchainer et de trouver des espaces. Alors qu’elles semblaient tout proches d’une quatrième réalisation, la trois-quart centre parisienne Caspar interceptait le cuir et s’en allait, au terme d’une longue course de 70 mètres, redonner l’espoir à son équipe. Julien transformait (18 – 7, 38è). Le Stade Français espérait sans doute atteindre la pause sur cet écart, mais les Toulousaines ne l’entendaient pas ainsi: sur une nouvelle sortie rapide dans le côté fermé, Murie, bien servie sur son aile par Vandesteene, manoeuvrait sa vis-à-vis et s’en allait inscrire le quatrième essai des siennes (23 – 7, 40è + 1). C’était le score à la pause.
Le Stade Toulousain contrôle le second acte face à des Parisiennes joueuses
Les deux équipes reprenaient sur le rythme auquel elles avaient terminé la première période. Après quelques petites minutes, les Haut-Garonnaises changeaient l’intégralité de leur première ligne: Cueye, Deschamps et Rière se voyaient remplacées par Ourliac, Divoux et Lapoujade. Les changements étaient également effectués côté visiteur, avec notamment les entrées de Rabette et Fofana, faisant remonter Lambare en deuxième ligne. Le cinquième essai toulousain était l’oeuvre de Bordes qui, suite à un départ derrière une nouvelle mêlée dominatrice, se faufilait entre deux défenseurs et salait la note (28 – 7, 47è).
L’intensité du match baissait ensuite quelque peu, malgré quelques éclairs ça et là. Un bel échange entre Cabalou et sa capitaine Bilon permettait aux Toulousaines d’entrer dans les 22 adverses, mais l’action ne donnait rien. En face, Saluzzo tentait, à la moindre occasion, de dynamiser le jeu, souvent soutenue dans ses initiatives par Caspar. La valse des changements se poursuivait: les Toulousaines Reulet, Cardoso et Pasin entraient sur le pré. La mêlée fermée parisienne continuait de souffrir le martyre, à tel point que la pilier Tanguy, boitant bas, devait à son tour quitter le terrain. N’ayant plus de joueuses de première ligne à disposition, les Parisiennes allaient terminer la rencontre à 14 (règle de la carence) et chacune des mêlées à venir serait simulée. On pouvait alors penser que le score n’évoluerait plus, mais les Toulousaines en avaient encore un peu sous les crampons. Prise de Bilon en touche, attaque rapide au grand large: les rouge et noir profitaient de leur supériorité numérique pour décaler Cartaillac. En bout d’aile droite, l’ailier prenait l’espace et inscrivait le sixième essai de sa formation au bout de trente mètres de course. Cerise sur le gateau, Girard réussissait la transformation (35 – 7, 80è + 2). C’était le score final.
Si le suspense n’a pas duré très longtemps sur la pelouse d’Ernest-Wallon, les deux formations (toutes deux privées de leurs internationales) nous ont toutefois offert un très bon match de rugby, d’autant plus qu’elles n’avaient pas foulé la pelouse en match officiel depuis le mois d’octobre. Malmenées en conquête directe, les joueuses d’Anaïs Lagougine et du Saint-Gironnais Sébastien Souquet n’auront jamais réellement mis à mal leurs adversaires en dépit de leur volonté farouche de produire un jeu ouvert. Dans la difficulté, Saluzzo et Caspar auront été les plus en vue. Il s’agira maintenant de bien finir la saison et de réussir les playdowns. Côté toulousain, tous les voyants étaient au vert: la mêlée a été largement dominatrice, permettant au groupe d’Anthony Granja et Pascal Belaubre de mettre patiemment son jeu en place, alternant près et large. En première ligne, Cueye – Deschamps – Rière ont donné le la, entraînant leurs coéquipières dans leur sillage. Bordes a minutieusement animé le jeu et le triangle arrière Vandesteene – Cartaillac – Murie a dévoré les espaces. De bon augure avant de se rendre à Rennes, concurrent direct pour la première place de la poule.
Réactions
Anthony Granja (Entraîneur, Toulouse): « Content du contenu, de l’implication et des intentions. On essaie d’avoir de la constance. Il y en a eu malgré quelques petits trous d’air et certains choix de jeu. Pas toujours facile d’avoir cette constance quand on apprend certaines décisions incompréhensibles de calendrier, d’obligation de repos pour les internationales de la part de la FFR. On arrive tout de même à travailler sereinement, qu’on nous enlève ou pas des joueuses. Le groupe est soudé, les joueuses sont concernées. Il me semble avoir vu un bon match de rugby (…) Super content du travail fait en mêlée. On domine tout le long. Plus les matchs vont se durcir, plus les fondamentaux vont être importants. C’est bon pour la suite« .
Anaïs Lagougine (Entraîneur, Paris): « On est tombées, comme on s’y attendait, sur une très grosse équipe du Stade Toulousain. Cela fait quelques semaines qu’on préparait ce match. On voulait mettre notre jeu en place dans ce match qui devait nous permettre de nous évaluer sur le travail fait en amont. Sensation mitigée, car on résiste bien mais on peine à produire (…) On avait des cadres retenues en Equipe de France. La fédération ne nous a pas permis de nous déplacer avec nos internationales. Deux secondes lignes, une troisième ligne, forcément ça manque. En première ligne, quelques titulaires habituels d’Elite qui sont absentes, donc on fait monter des joueuses de Fédérale« .
Fiona Lecat (Troisième ligne, Toulouse): « On est très contentes du résultat. Une victoire bonifiée. C’était l’objectif qu’on s’était fixé. Bien évidemment, on a aussi conscience d’être des prvilégiés, d’être sur le terrain. On en profite, on est très heureuses (…) Notre pack a été conquérant, que ce soit en touche ou en mêlée. Derrière, c’est toujours plus facile d’être dans l’avancée et de marquer des essais. Il faut garder ce cap (…) Très contents aussi que, dufait de l’absence des internationales, de jeunes joueuses rejoignent le groupe. Le groupe est élargi à 40 joueuses, s’entraîne ensemble depuis six semaines, et aujourd’hui, ça porte ses fruits ».
Marie Saluzzo (Demi de mêlée, Paris): « Une belle confrontation face à une solide équipe de Toulouse. Dès qu’on pouvait garder notre structure de jeu, on arrivait à rivaliser avec elles. C’est dommage qu’on n’ait pas su le faire pendant 80 minutes. On n’a pas à rougir. On va garder les points positifs pour préparer la suite: on a un maintien à aller chercher au terme de la saison (…) Les consignes étaient de dynamiser, d’éclater au bord des rucks pour pouvoir rapidement jouer au large. On a eu du mal à garder le ballon et à jouer debout. Pourtant, c’est habituellement un de nos points forts« .
Feuille de match
A Toulouse (Stade Ernest-Wallon): Stade Toulousain Rugby bat Stade Français Paris 35 à 7 (mi-temps:23 à 7)
Arbitrage: Mme Mélissa Leboeuf (Ligue Auvergne Rhône Alpes) assistée de Mme Bérénice Loubet (Ligue Occitanie) et M. Pierre Puharre (Ligue Nouvelle Aquitaine).
Pour Toulouse: 6 essais Rière (18è), Fedrighi (20è), Cartaillac (36è, 80è + 2), Murie (40è + 1), Bordes (47è), 1 pénalité Cabalou (6è), 1 transformation Girard.
Pour Paris: 1 essai Caspar (38è), 1 transformation Julien.
Composition Toulouse: Vandesteene; Cartaillac, Rufas, Girard, Murie; Cabalou (o), Bordes (m); Lecat, Bilon (cap), Gougeon; Fedrighi, Durand; Rière, Deschamps, Cueye.
Sur le banc: Divoux, Ourliac, Reulet, Cardoso, Tomasella, Pasin, Perceval, Lapoujade.
Entraîneurs: Anthony Granja et Pascal Belaubre.
Composition Paris: Scanzi; Galtier, Muller, Caspar, Mounfounda; Julien (o), Saluzzo (m, cap); Lambare, Meddah, Martin; Viardot, Tord; Tanguy, Delaunay, Diaw.
Sur le banc: Sade, Adolphe, Rabette Gâche, Fofana, Aubrun, Clément, Bridet.
Entraîneurs: Anaïs Lagougine et Sébastien Souquet.
Super article , comme d’habitude .
Et superbes photos aussi, comme d’habitude ! 🙂