Nationale 2 : Le destin atypique de Romain Bourgine (SC Graulhet) – Romain Bourgine évolue au Sporting Club Graulhetois en Nationale 2 depuis deux saisons. Pourtant, le jeune homme de 27 ans a bien failli ne plus pouvoir jouer au rugby après une grave blessure subie en 2019. Le solide seconde ligne évoque ici son parcours et certains de ses choix de vie. D’Angers à Graulhet, en passant par Bagnères-de-Bigorre et des sélections gendarmerie, découvrez un destin pour le moins atypique… (Par Loulou, photos Christophe Fabriès)
“Sans ma blessure, je n’aurais finalement jamais joué à ce niveau.”
Romain, comment t’es venue cette passion pour le rugby ?
R.B. : “J’ai baigné très jeune dans le milieu du rugby. Mon père était encore joueur quand j’étais petit et il était très investi dans la vie du SCO Rugby d’Angers. J’y ai pris ma première licence à l’âge de 4 ans et j’y ai fait toute mon école de rugby.”
Quand tu as fait tes premiers pas en sénior, est-ce que tu ambitionnais de jouer à haut niveau ?
“Durant mes premières années séniors à Angers (Fédérale 3) j’avais un bon équilibre de vie. J’étais gendarme au PSIG de la ville. Même si il m’arrivait de vouloir jouer plus haut, je pense que je n »aurais pas tenté l’aventure. Je n’avais pas l’intention de bouger, j’aimais mon travail et mon quotidien.“
Ton destin bascule en 2019, lors d’un match avec l’équipe de France Gendarmerie, avec une grave blessure au genou…
“Oui, dès la première action de la Finale des championnats de France militaire à Aix-en-Provence,je me fais une rupture des croisés, plus une fracture du tibia et et une fracture de la rotule. Pour moi à ce moment-là, c’était fini, je ne pensais pas pouvoir rejouer. Le chirurgien qui m’a opéré m’a dit que même pour marcher ça allait être dérangeant. J’ai été réformé de la Gendarmerie à cause de cette blessure. L’année et demie qui a suivi fut compliquée. J’ai perdu ma maison parce que je ne pouvais plus payer les mensualités, j’ai dû retourner chez mon père. J’ai fait une petite déprime, j’ai pris 20 kilos. Un moment très dur.”
C’est pourtant à ce moment qu’une porte s’ouvre pour toi. Comment arrives-tu à rebondir après cette longue période de convalescence ?
“L’entraîneur de Bagnères-de-Bigorre (Fédérale 1), David Fourtané, m’a appelé pour me dire qu’il m’avait vu jouer il y a quelques années avec l’équipe de France Gendarmerie et qu’il souhaitait me prendre en test chez eux. Je lui ai dit que j’étais en méforme, que je faisais 140 kilos et que je n’avais pas joué depuis 1 an et demi. Je pensais sincèrement que c’était une blague, mais il m’a laissé le temps de réfléchir quelques jours. Prétendre à rejouer au rugby et en Fédérale 1, je n’ai pas hésité très longtemps.”
Tu as dû suivre une rééducation millimétrée pour retrouver la forme ?
“Je n’avais pas encore recouru depuis la blessure. David m’a dit tu viens à Bagnères et on s’occupe de toi pour la réathlétisation, t’es pas obligé de jouer tout de suite, on se laisse du temps. On t’aidera à trouver du boulot et on te procurera un logement. Je suis arrivé vraiment hors de forme (rires), sur le premier test bronco, j’ai fait deux allers-retours et j’étais cramé. Par contre, le renforcement du genou évoluait dans le bon sens, je retrouvais des sensations même si la rééducation a été longue et compliquée.”
Pour beaucoup de joueurs, une telle blessure freine les velléités de haut niveau, ou de rugby tout simplement. Pour toi ce fut tout le contraire, c’est presque un tournant qui t’a mené en Nationale 2 ?
“Sans ma blessure, je n’aurais finalement jamais joué à ce niveau oui, et je n’aurais jamais passé tous ces diplômes. Je pense même que j’aurais décliné l’offre de David car mon poste me convenait. Je le remercie souvent, il sait que je lui en dois une belle. Il est désormais entraîneur des espoirs à Provence. Quand il est parti de Bagnères je lui ai dit « encore merci, c’est grâce à toi que je peux vivre tout ça ». Si il me rappelle pour le rejoindre à Aix, j’y vais direct.” (rires)
En revanche, tu ne pouvais plus prétendre aux sélections Gendarmerie ?
“J’avais perdu le statut de militaire, je ne pouvais donc plus rien faire avec la sélection. Mais on avait gardé contact et on a trouvé un accord pour que j’intègre le staff. Au début je faisais la touche, la mêlée, et j’apprenais encore très humblement. Plus les mois passaient et plus je m’intégrais au staff. Le manager principal, a été recruté pour rejoindre Mont-de-Marsan avec les pro en qualité d’analyste vidéo. Il a dû lâcher la sélection et un poste s’est ouvert. Lors de son départ, il a présenté le nouvel organigramme de la sélection et m’a nommé entraîneur principal, une belle surprise. Il avait confiance en moi pour reprendre les rênes. Depuis 2021, je suis donc manager de la sélection.”
En plus de ce contrat inespéré à Bagnères, tu te lances donc dans un nouveau parcours professionnel ?
“Oui, j’ai entamé un cursus d’éducateur sportif. J’ai validé 3 BPJEPS à la Section Paloise. L’an dernier j’ai passé mon DEJEPS au Castres Olympique et en ce moment je fini un diplôme de préparation mentale. L’objectif est de pouvoir entraîner dans les saisons à venir. Pourquoi pas dès cette année en tant que préparateur mental à Graulhet”
Du Stade Bagnérais à Graulhet, nouvelle vie dans le Tarn…
Justement, pourquoi ce transfert vers Graulhet ?
“J’ai rencontré Sophie qui habite à Castres. Donc j’étais prêt à venir dans le Tarn mais il me fallait un club pro pour passer mon DE et un bon club à côté pour continuer le rugby. J’ai été pris au Castres Olympique pour ma formation, je m’occupais des skills pour les cadets. Côté rugby, avec Graulhet cela s’est fait rapidement et ça me faisait encore grimper une marche après une bonne saison avec Bagnères.”
Justement, pour finir, comment se passe cette saison en Nationale 2 avec Graulhet ?
“Il y a eu pas mal de changements à l’intersaison, avec un recrutement très solide. Mais il fallait que la mayonnaise prenne. Au début, on a eu du mal à se trouver sur le terrain. Il fallait un peu de temps pour que ça se mette en place et ça commence à être vraiment mieux. Même dans l’état d’esprit on ressent à l’entraînement que c’est différent. Le groupe commence à se souder mais on attend encore le match référence. L’objectif est de réussir à s’installer en Nationale 2.”