C’est une sélection « Barbarians » d’actuels et anciens joueurs de la région qui est allée sur l’île d’Ibiza disputer un tournoi de rugby international. L’occasion d’un week-end mémorable où les Français ont rappelé que si ils n’avaient pas inventé le rugby, ils pouvaient le réinventer l’espace d’un séjour…
Voici le récit d’une aventure pas comme les autres, celle du French Fiesta Rugby Club (FFRC) sur l’île d’Ibiza. Départ Jeudi 5 juin 2014 de Gratentour place du village 12h, retrouvailles, effusions viriles entre les membres de l’équipe. Trajet sans encombre, arrivée Barcelone 18h30 pour un décollage à 21h15 vers Ibiza. Halte de courte durée à l’hôtel et départ deux minutes plus tard vers la vieille ville d’Eivissa où la « temporada » bat déjà son plein. Les heures qui suivent resteront dans les mémoires de certains, mais la décence ne me permet pas d’en parler ici. Mais peu importe, l’essentiel étant le jeu….
Toujours est-il que nos joyeux lurons sortent du mythique Pacha sur le coup des 08h30 du matin, petit tour sur le port pour une collation matinale car c’est jour de rugby sur l’île espagnole. Ils décident d’acheter la presse locale : « Le diario de Ibiza » et là, surprise quand, à la page des sports, la FFRC est devenue une équipe de 1ère division française, apprenant par la même qu’ils jouent le soir même, contre l’armée anglaise et l’équipe d’Ibiza, renforcée pour l’occasion par quelques Néo-zélandais en vacances sur l’île. Pour un tournoi triangulaire qui s’apparente au triangle des Bermudes tant nos jeunes et vieux toulousains craignent de se perdre dans une machine à laver hispano-anglaise.
Après 5 bonnes heures de sommeil et une belle veille de tournoi donc, l’équipe prend le parti de se mettre au vert à partir de 14h pour un repas à Cala Carbo afin de souder l’équipe et de la préparer mentalement aux défis qui l’attendent contre l’armée anglaise en premier lieu. Una paëlla mixta, quelques bières et du vino tinto aident nos ressortissants à envisager au mieux cette rencontre. L’optimisme est au beau fixe lorsque ils rentrent à 19h30 à leur hôtel pour un départ en bus vers 20h sur le lieu de leurs futurs exploits. La découverte de l’escouade britannique, impeccable d’uniformité, impressionnante de gabarits et terrifiante de détermination ramène les noceurs de la veille à leur panoplie « french touch » : 3 gourdes, des tongs, pas un tee-shirt ou un short identiques, et les bières à la main… Sourire entendu, mais courtois de leurs adversaires. C’est ainsi que la distribution des maillots qui se voulait pleine de légèreté devint plus traditionnelle et rugbystique au regard de l’adversité. A la demande générale de la French Fiesta Rugby club, ce match se jouant le jour du 70éme anniversaire du D-day (jour du débarquement), une minute de silence sera observée pour les soldats anglais ayant débarqué sur Sword et Juno Beach . Moment aussi solennel qu’improbable que cette commémoration…et pourtant si vraie.
Mauls épicés, Rosbeef cuits et victoire espagnole
C’est l’heure de l’échauffement, petit touché pour commencer : capots ouverts, bave aux lèvres, le forfait est proche et les turpitudes de la veille se font déjà sentir. Surtout qu’en face : réunion, cris de guerre….. strap aux jambes pour les lifters, travail au joug pour les avants, bref du sérieux. Côté français, on commence à se raconter les souvenirs de la veille, certains commencent même à loucher avec envie sur la poubelle noire remplie de canettes de bières fraîches. Bref là aussi du sérieux… C’est là que les Anglais décident de séparer les avants des trois-quarts. Début de la rencontre.
Aïe ça pique ! C’est anglais ! Ça joue ! Comme on dit : ils respectent l’adversaire ! 10mn de mise en jambes en guise de cellule de dégrisement puis les grognards aguerris aux joutes régionales du rugby midi-pyrénéen se réveillent. Première charge, 2 culs anglais, 25m de gagné. La french team surprend des Brittons hagards et le jeu d’avants déstructeur laisse place à des trois quarts inspirés : essai en coin ! Les spectateurs assistent médusés au remake d’un album d’Asterix et Obelix, les irréductibles ayant semble-t-il trouvé la potion magique dans quelques endroits de nuit. Les sujets de sa gracieuse majesté accusent le coup. Mieux, et malgré l’énervement palpable de cette colonie britannique, les Français emportent tout sur 40m dans un maul dévastateur pour aplatir. 10-0 à la pause citrons.
A la reprise, les rosbeef se rebiffent. La FFRC plie, se relève, grince de toute part mais ne rompt pas. Avants, 3/4 tout le monde s’y file, les tampons affluent et la chaleur ambiante joue pour les Latins.Car un deuxième ballon porté, suite à une touche contrée enverra l’irresistible armada tricolore à dame. Avant qu’un dernier essai ne vienne sceller une défaite cuisante 22 à 0 pour l’armée anglaise. « Sorry, good game ». Fort de cet authentique exploit, nos rugbymen sont priés de démarrer immédiatement face à l’équipe locale. Cet enchaînement sans repos contre une vaillante petite équipe espagnole qui défendra fièrement sa chance était de trop. Défaite 10 à 5 avec le sourire pour ne pas froisser les hôtes du séjour.Après une demi-heure de pose les Anglais quant à eux battent les Espagnols par un 12 à 0 conforme aux standards internationaux de ce jeu.
Se pensant grands vainqueurs du Tournoi la FFRC encaisse une mauvaise surprise, les organisateurs en avaient décidé autrement et souhaitent départager en tapant des drops puisque chaque équipe est nantie d’une victoire. A cette loterie même les Anglais les devancent à leur plus grand désarroi. Mais il y a 70 ans, jour pour jour, ils étaient aussi devant, et là ils n’avaient rien trouvé à redire. Un bel épilogue finalement synonyme de cet épique séjour en terre ibisquaine. Car la troisième mi-temps fut un morceau d’anthologie, où les Anglais gratifièrent l’assistance d’un magnifique « Alouette, gentille alouette » et les Espagnols d’un rite initiatique quelque peu étrange où il s’agissait d’un slip dans un verre de bière… Bref un triangle finalement amoureux tant tous les joueurs des trois équipes confondues s’abîmèrent avec délectation dans les us et coutumes locales. Cette première édition fut un succès et nos français promirent d’y retourner le prochain été.