Trois heures après la condamnation prononcée à l’encontre de Bernard Laporte par le Tribunal correctionnel de Paris (2 ans de prison avec sursis, amende de 75 000€, et 2 ans d’interdiction d’exercer toute fonction dans le rugby) , le Bureau Fédéral de la Fédération Française de Rugby s’est réuni pour analyser les conséquences juridiques de cette décision, et apporter des réponses quant à l’avenir immédiat de la gouvernance du rugby français…
« En tant qu’institution partie civile lors du procès, la FFR entend rappeler son engagement à lutter contre toute forme d’atteinte à la probité et aux valeurs sportives qu’elle incarne. Le Bureau Fédéral prend acte des conclusions du Tribunal de Paris. Concernant l’abus de confiance au préjudice de la FFR, le Tribunal a jugé qu’il n’y a eu aucun préjudice à l’encontre de la Fédération Française de Rugby. Le Tribunal a notamment précisé que les contrats de partenariat avec le groupe ALTRAD « n’ont pas été sous–estimés », et « qu’il n’y a pas eu d’appauvrissement de la FFR ». »
Tels sont les mots d’un Bureau Fédéral qui prend acte de l’interjection en appel de son Président et de la suspension immédiate des effets du jugement : « Le Tribunal, qui n’a pas suivi le réquisitoire du Procureur de la République, a jugé que la condamnation de Bernard LAPORTE n’est pas soumise à l’exécution provisoire, et qu’il peut conserver ses fonctions de Président de la Fédération Française de Rugby. Il demeure présumé innocent en l’attente du jugement de la cours d’appel. Le Bureau Fédéral prend également acte de la relaxe totale de son Vice–Président Serge Simon. »
Le Bureau Fédéral tient enfin à souligner qu’il est « déterminé à maintenir son engagement au bénéfice du rugby français » tout en concluant par « Notre institution a besoin de stabilité, et cela notamment à l’orée d’un événement d’une importance fondamentale pour l’avenir de notre sport, la Coupe du Monde 2023 organisée en France. »
« Le courage de se confronter à l’expression des clubs… »
Un stabilité mise à mal d’abord par Florian Grill, opposant déclaré depuis la campagne 2020 à la présidence de la FFR (remportée par Bernard Laporte avec 51.47% des votes contre 48.53%). Il a donné son sentiment dans le Journal Le Parisien : « Ma première réaction, c’est qu’il s’agit d’un tremblement de terre pour le rugby français. Le tribunal a prononcé une sanction inédite dans l’histoire de la FFR. Devant la gravité des accusations et de la sanction prononcée, et même si le président de la Fédération fait appel, il me semble que le comité directeur, qui a failli, devrait démissionner afin de donner la parole aux clubs […] Considérer qu’il ne s’est rien passé, ne serait pas à la hauteur des enjeux à venir… »
Florian Grill, toujours aussi offensif, fait notamment référence à la renégociation de la concession du Stade de France, au sujet des commotions, à la Coupe du monde évidemment, à l’avancement des frais d’avocat de Bernard Laporte par la FFR, au pilotage défaillant du comité d’organisation de France 2023 représenté par Claude Atcher, demis de ses fonctions et également condamné. Il estime que « Ces dossiers qui ne peuvent être traités par cette gouvernance. Seules les urnes peuvent préserver la Coupe du monde à venir et le XV de France. Il faut avoir un peu de courage, le courage de se confronter à l’expression des clubs. Ce sera au profit de l’équipe qui l’emportera, pas forcément moi d’ailleurs. »
« Ce nouveau contexte fait obstacle à ce que Bernard Laporte puisse, en l’état, poursuivre sa mission dans de bonnes conditions à la tête d’une Fédération… »
Un appel aux urnes visiblement souhaité par la Ministre des Sports Amélie Oudéa-Castéra, en personne, qui s’est exprimée en fin de journée, via un communiqué que nous qualifierons d’incisif, et qui ne va pas favoriser la stabilité espérée par le Bureau Fédéral : « En droit, la situation impose le respect de la présomption d’innocence dont doit bénéficier jusqu’à son jugement définitif Bernard Laporte, qui doit aussi pouvoir organiser sereinement sa défense personnelle […] En termes de bonne gouvernance, la ministre considère que ce nouveau contexte fait obstacle à ce que Bernard Laporte puisse, en l’état, poursuivre sa mission dans de bonnes conditions à la tête d’une Fédération délégataire d’une mission de service public, à un moment aussi décisif pour le rugby français que la dernière ligne droite avant une Coupe du monde de rugby où la France recevra les nations du monde entier. La ministre appelle donc à ce qu’un nouveau temps démocratique permette aussi rapidement que possible au rugby français de repartir sur des bases suffisamment saines et solides, avec une gouvernance de la Fédération qui aura la pleine confiance des clubs et saura rassembler. Elle est attachée, dans un cadre éthique et de gouvernance clair, au principe d’autonomie des fédérations et à son respect. C’est donc aux instances de la Fédération qu’il revient aujourd’hui de prendre leurs responsabilités. »
Plus que jamais, le rugby français reste donc dans le flou quant au devenir de sa gouvernance. Affaire à suivre comme on dit dans ce cas-là…