Anthony Jelonch, corps et âmes – Distillant une trentaine de plaquages en tous genres, Anthony Jelonch s’est jeté à corps perdu dans l’enfer vert irlandais il y a quinze jours. Une performance saluée de tous pour un corps meurtri, plongé dans la glace avant le rendez-vous contre les copains de Finn Russel. Ce dimanche, alors qu’il venait de subir un violent choc à la tête contre deux Ecossais aux larges et trop hautes épaules, le Gersois à tête dure, est revenu à 150%, après un protocole commotion que l’on pouvait pourtant imaginer sans retour…
Pensez-donc, le 3ème ligne bulldozer en a profité pour distribuer quelques arrêts buffet, cartouches et caramels à répétition, dont il a le secret. Jusqu’à cette action fatidique où il sauve la patrie d’un essai en coin tout fait pour les Ecossais.
Oui, le vrai Braveheart était tricolore ce dimanche, et il a réellement fait don de son corps à la patrie, tellement il met du cœur à l’ouvrage sur chacune de ses interventions. Au point d’y laisser un genou au Stade de France, sa fin de saison en club, et peut-être même la Coupe du Monde.
Des voix d’élèvent pour s’indigner sur son retour après son choc à la tête. D’autres s’insurgent sur son temps de jeu trop important à chaque match. Et puis, il y a ceux qui cumulent les critiques. Doit-on rappeler que le rugby est le seul sport collectif de combat, où les chocs entre avants sont équivalents à des accidents de la route, que l’on appelle affectueusement dans le monde ovale, « collisions ».
Doit-on rappeler aussi qu’entre le Top 14 (29 matchs), la Coupe d’Europe (8 matchs), la tournée d’Automne et le Tournoi (8 matchs), un international peut disputer entre 30 et 35 matchs par an ? Doit-on (encore) rappeler l’iniquité entre les pays. Quand Anthony Jelonch a débuté le Top 14 2022-2023 lors de la 1ère journée le 4 septembre dernier (pour un total de 10 matchs avec le Stade Toulousain), Josh Van der Flier, 3ème ligne aile du Leinster n’a débuté l’Union Rugby Championship que le 23 septembre, soit 4 semaines plus tard.
1321 minutes jouées, 213 de plus qu’un 3ème ligne irlandais
En revanche, le meilleur joueur du monde 2022, a bien disputé les 4 matchs de Coupe d’Europe, plus ceux de l’équipe Nationale, pour un total de 1 108 minutes disputées. Jelonch a joué les 4 matchs de coupe d’Europe, plus les 3 matchs de la série automnale (et ce, durant 80 minutes, tout comme les deux premiers du Tournoi), pour un total de 1321 minutes. Soit 213 minutes de plus que le joueur irlandais, près de 3 matchs en plus dans les pattes. A ce niveau, pour ces joueurs devenus de véritables athlètes de très haut niveau, toute économie d’énergie est la bienvenue.
Alors nul ne sait si Anthony Jelonch se serait blessé tôt ou tard, mais l’on peut se questionner sur cette folle cadence imposée à nos joueurs entre un championnat à rallonge, cette coupe d’Europe sud africaine, et ces matchs internationaux énergivores.
La liste des blessés (moyenne ou longue durée) s’allonge, et l’on peut craindre qu’elle se remplisse encore d’ici le 8 septembre, tant les organismes semblent usés après une année 2022 enthousiasmante. L’heure est à la prise de conscience générale, à la crainte inconsciente de voir un match et regarder si un joueur reste au sol, avec son genou, son épaule, sa cheville ou autre dans la boîte à gants (remember Marchand, Cros, Dupont, Ollivon, Vincent, Le Roux, Gros, Villière, Danty et Jelonch désormais).
L’heure est à prioriser les objectifs, à piocher dans le grand réservoir français pour faire souffler quelques corps titulaires meurtris, et quelques têtes engourdies par des matchs de 80 minutes chaque weekend.
Mais l’heure est aussi et surtout venue d’adresser tout notre soutien au guerrier de Vic Fezensac, lui souhaiter un prompt, rapide et total rétablissement pour entrevoir un retour avec les Bleus d’ici cet été. Pour toi Anthony, qui te donne corps et âme sur le pré, la grande famille du rugby est derrière toi pour faire esprit de… corps.