Ce huitième de finale du championnat de France de deuxième série mettait aux prises deux clubs distants de plus de 500 kilomètres, mais avec les Pyrénées comme dénominateur commun. D’une part, l’Union Sportive Millas, des Pyrénées Orientales, qui s’était largement imposée face au Bastia XV (30-16) lors du tour précédent, d’autre part, venu des Pyrénées Atlantiques, le Ciboure Rugby Club qui avait eu plus de mal à venir à bout des Héraultais de Murviel-Thézan (20-18). Laquelle de ces deux formations allait sortir vainqueur de ce duel basco-catalan ? (Par Marco Matabiau/ Photos Alain Montségur)
D’emblée, les Millassois occupaient le terrain adverse et s’offraient une relance par le solide deuxième ligne Enrique (l’ancien Cérétan). Ils obtenaient même une pénalité aux 40 mais, pour sa première tentative, Martinez ne réglait pas la mire (2è). La domination catalane se poursuivait mais restait stérile. Ciboure sortait enfin de sa réserve quand, au sortir d’une belle prise dans l’alignement, l’ouvreur Madrid lançait le jeu vers Fenateau. Le trois-quarts centre tentait de naviguer dans la défense, mais l’action avortait (7è). Millas se voyait offrir une nouvelle pénalité quand, suite à des charges de Le Gal et Allègre, la défense se mettait hors-jeu. Martinez retentait sa chance des 40, sans plus de succès (10è). Les deux formations peinaient à se découvrir et axaient plutôt le jeu sur de l’occupation au pied. A ce petit jeu-là, Ciboure récoltait une pénalité, mais la frappe de Madrid heurtait le poteau gauche (20è).
Dans la foulée, le CRC parvenait à enchainer et Iralde cherchait à alerter ses trois-quarts. La passe du demi de mêlée était interceptée par Allègre qui filait inscrire l’essai en contre… mais M. Gaudriot donnait du sifflet et sanctionnait Millas pour un plaquage illicite du deuxième ligne fraichement entré en jeu Patot. Une faute qui valait une pénalité et une belle remontée de bretelles par Enrique à son jeune coéquipier. Le coup de pied de Madrid fuyait une nouvelle fois les barres (22è). Les avants catalans se remettaient ensuite en ordre de marche, mais le maul porté prometteur ne donnait finalement rien, la pénalité obtenue étant retournée par M. l’arbitre. Le pilier basque Fosseries devait d’ailleurs quitter momentanément ses camarades, touché au visage.
Contre toute attente, c’est Ciboure qui déflorait le planchot. Jeu au pied haut de Madrid, mauvaise appréciation de l’arrière Cremaschi, qui laissait retomber le ballon, dont les rebonds trompaient également l’ailier Aguilar. A proximité de la ligne, les Basques se jetaient sur le ballon, le trois-quart centre Berdou ramassait, feintait la passe et marquait. Madrid transformait (7-0, 30è). Du pragmatisme à l’état pur. Millas ne s’en laissait pas compter: nouveau départ de Le Gal, relais rapide et tranchant de Patot. La défense adverse se mettait à la faute. Il n’en fallait pas plus à Martinez pour ouvrir, des 22 mètres en face, son compteur personnel (7-3, 34è). A l’approche de la pause, les Kaskarrot avaient l’occasion de reprendre leurs distances, mais Madrid, en manque de réal…isme, ratait à nouveau la cible. En revanche, les Catalans finissaient fort. Prise en touche, trouée d’Allègre, qui trouvait Llech au soutien. Le pilier filait tout droit sur près de trente mètres, évitait le dernier défenseur et marquait l’essai. Avec la transformation de Martinez, l’US Millas prenait trois points d’avance à la pause (10-7, 40è + 2).
Un deuxième acte cadenassé et crispé
La seconde période commençait par un grattage du basque Postel sur son vis-à-vis Le Gal (42è). Millas, bien que peu efficace, maitrisait le jeu par ses avants, notamment grâce aux charges d’Allègre et du talonneur Vencell (47è). Quelques minutes plus tard, après un nouveau bel enchainement autour d’Allègre et de Patot, Fenateau écopait d’un carton jaune (51è). Une infériorité numérique qui, loin d’inhiber les Jaune et Bleu, les voyait plutôt reprendre des couleurs, comme sur cette superbe diagonale au pied d’Iralde (55è). Nouveau lancement au centre du terrain autour de Postel et Berdou, mais la défense des Rouge et Noir faisaient le dos rond. La digue allait céder peu avant le « water break », Madrid réussissant une pénalité pour rétablir l’égalité au score (58è).
Millas, sentant le match lui échapper, remettait de l’ordre dans la maison. Croisée entre Amrani et Martinez. Le trois-quarts centre perçait plein champ et obtenait une pénalité qu’il transformait lui-même des 25 mètres (13-10, 65è). Ciboure essayait de recoller immédiatement, mais le drop d’Iralde fuyait les poteaux (68è). Ce n’était que partie remise puisque, sur pénalité, Madrid rééquilibrait les forces (13-13, 70è). L’ouvreur s’essayait à son tour au drop pour faire passer les siens devants, mais sans plus de réussite que son compère de la charnière (73è). Les deux formations jouaient serré, par peur de faire la faute de trop qui donnerait la victoire à l’adversaire. Après avoir gratté un ballon au sol sur Berdou, les Millassois glanaient une nouvelle pénalité. Ils optaient pour la pénal touche: Allègre, toujours lui, captait le cuir, puis Amrani se faisait la malle sur le petit côté avec son pilier Tourek. Dans les 22, Ciboure se mettait à la faute et concédait une pénalité en coin. Martinez avait la qualification au bout du pied, mais son coup de pied passait à gauche des barres. On partait donc en prolongations. Deux fois dix minutes.
Les prolongations comme juge de paix
Dès le renvoi, les Catalans se mettaient sous pression: ballon mal maitrisé et récupéré par le deuxième ligne Lecuna. Progression jusqu’à quinze mètres de l’en-but. Toutefois, l’action avortait. Échaudée, l’USM ne voulait pas se faire surprendre: prise en touche, progression sur maul porté et nouvelle pénalité. Pourquoi changer une formule gagnante? Sur la pénal touche suivante, les avants emportaient leurs adversaires et passaient la ligne pour l’essai libérateur. Martinez transformait (20-13, 86ème). Le score restait inchangé jusqu’à la mi-temps des prolongations.
Peu après la reprise, Millas se tirait deux balles dans le pied. La première quand un excellent travail sur maul porté était annihilé par une faute d’anti-jeu (93è). La seconde quand le talonneur Vencell récoltait un carton jaune (95è). Les Catalans allaient ainsi terminer la rencontre en infériorité numérique, jamais facile avec la chaleur qui régnait sur Marcel-Billière. Postel et Berdou faisaient le forcing et obtenaient des pénalités. Sur l’une d’elles, jouée à la main, un solide contre ruck permettait aux Millassois de récupérer e ballon… Ballon perdu quasiment dans la foulée pour offrir une dernière balle d’attaque aux Cibouriens. Madrid se servait de ses centres comme leurres et allongeait pour Etchevarria, mais l’arrière ne parvenait pas à contrôler la balle, qui sortait en touche. L’occasion pour M. Gaudriot de mettre un terme à la rencontre.
Après un match accroché et indécis, Millas se qualifie pour les quarts de finale du championnat de France. Les Basques n’auront cependant nullement démérité. Bien moins armés physiquement, les hommes d’Olivier Martin et Stéphane Mugabure auront tout donné pour faire céder la digue catalane. Optant le plus souvent pour un long jeu d’occupation (Iralde et Madrid ont fait étalage d’un jeu au pied de qualité), ils auront peut-être choisi un peu tard de donner de l’air au ballon pour déplacer la défense adverse. Même si l’aventure s’arrête là pour le CRC, on pourra souligner le match solide de Soultzener et Lecuna, sans oublier la performance majuscule de Postel qui, en bon capitaine, aura tout fait pour aider les siens à passer l’obstacle catalan.
Pour sa part, s’appuyant sur ses forces habituelles que sont la conquête, les ballons portés et la défense, l’US Millas sera restée fidèle à ce qu’elle sait faire. Et bien lui en a pris. Malgré quelques soucis d’indiscipline (de nombreuses pénalités concédées, deux pénalités retournées), les joueurs de Christophe Perez et Marc Billes ont bénéficié de l’expérience des nombreux cadres de l’équipe. Une expérience notamment acquise dans les clubs de Céret (Enrique, Tourek), Sigean (Vencell) ou encore Prades (Amrani). Néanmoins, comment passer sous silence l’énormissime match des troisièmes lignes Le Gal et d’Allègre, dans tous les bons coups catalans. Place maintenant à la récupération et à la préparation du quart de finale à venir.
Réactions
Christophe Perez (Entraîneur, Millas): « On peut être fiers. Les joueurs se sont battus jusqu’à la dernière minute contre une équipe sérieuse. On a été à mon goût un peu trop sanctionnés car on a fait le jeu pendant tout le match. On a fait preuve d’une grande solidarité dans un match à haute pression. On est un bon groupe. La défaite contre Briatexte nous a fait mal à la tête. Aujourd’hui, on a été plus pragmatiques. Cela a payé. Pour la renaissance du club, c’est une belle chose, on a certes des anciens, mais également de nombreux jeunes pour lesquels je suis très content. »
Olivier Martin (Entraîneur, Ciboure): « Déçus, surtout après un défaite en prolongations. En même temps, on perd contre cette équipe à qui on rend trente kilos et cinq ans à chaque poste. A un moment, ça se paye. Même si on n’est pas passés très loin, les joueurs ont fait un match plein de courage, de ces choses dont on a le secret. Peut-être que moi, en tant qu’entraîneur, j’ai manqué un peu d’ambition dans le jeu. On aurait peut-être dû moins occuper au pied et jouer davantage. Les déplacer, même s’ils étaient solides en défense. A nous de progresser et de revenir mieux armés dans les saisons futures ».
Olivier Allègre (Troisième ligne, Millas): « On était prêts mais au début, on ne s’axe pas assez sur le jeu de devant. On se perd, on les laisse marquer. Ainsi, on les remet dans la partie. Devant, on les domine largement. Après, on fait ce qu’il faut en seconde période. On met la main sur le ballon, on joue des groupés pénétrants comme on sait le faire depuis le début de l’année. On marque l’essai quand il faut. La victoire est là, et elle est encore plus belle parce qu’on a dû faire face à une solide équipe du Pays Basque ».
Pierre Postel (Troisième ligne et capitaine, Ciboure): « Un match très compliqué. Une équipe très dense, très en place devant. Je pense qu’on n’a pas démérité. On va jusqu’aux prolongations. On prend un essai sur ballon porté sur lequel on ne peut pas faire grand-chose. Ils nous rendent tous 30 kilos. On fait une belle saison. Il faut retenir ça ».
Feuille de match
A Rieumes (Stade Marcel-Billière): Union Sportive Millas bat Ciboure Rugby Club 20 à 13 après prolongations (mi-temps: 10 à 7 pour Millas, 13 à 13 à la fin du temps réglementaire).
Arbitrage: M. Sylvain Gaudriot assisté de MM. Damien Audinet et Jérôme Soûla (Ligue Occitanie).
Cartons jaunes: à Ciboure, Fenateau (51è); à Millas, Vencell (95è).
Pour Millas: 2 essais Llech N. (40è + 2), collectif (86è), 2 pénalités (34è, 5è) et deux transformations Martinez M.
Pour Ciboure: 1 essai Berdou M. (30è), 2 pénalités (58è, 70è) et 1 transformation Madrid.
Composition Millas: Cremaschi M.; Bails, Bosch (cap), Martinez M., Aguilar; Amrani Y. (o), Amrani J. (m); Le Gal, Cordeau, Allegre; Enrique C., Loeillet; Llech N., Vencell, Tourek.
Sur le banc: Martinez E., Patot, Aouissi,, Llech J., Fardau, Collgros, Coll.
Entraîneurs: Christophe Perez et Marc Billes.
Composition Ciboure: Etchevarria; Duhart, Berdou M., Fenateau, Lasserre; Madrid (o), Iralde (m); Postel (cap), Berdou J., Soultzener; Lecuna, Ricart; Endara, Duguet, Fosseries.
Sur le banc: Muet, Manterola, Izaguirre, Claverie, Hiribarren, Etcheverry, Berdou A.
Entraîneurs: Olivier Martin et Stéphane Mugabure.