L’Olympique Labruguiérois XV a fêté ses quarante ans en juin dernier, mais a soufflé les bougies par une descente en deuxième série. La saison 2015-16 s’annonçait compliquée, elle l’a été. 15 matchs et 15 défaites, -321 pts au goal average, dernier, condamné à la 3ème série et…un groupe qui est resté uni malgré tout. Pour maintenir le navire à flots, malgré la tempête perpétuelle, Charles Martin et Yohan Clerici, les deux coachs, ont tenu bon la barre. Pour ce dernier, 33 ans, novice à ce poste (mais qui a toujours baigné dans le management de par son père passé par Lourdes ou Bègles), cette saison restera très particulière. Elle restera aussi, et quoiqu’il arrive, celle où tout un groupe est allé chercher une victoire aussi improbable que méritée. Oui, dimanche dernier, Labruguière a mis fin à sa terrible spirale, et a battu le deuxième de la poule (18-7). Yohan Clerici nous a livré son sentiment, entre émotion et conviction, sur cette double grande première…
Yohan, quand vous arrivez dans le club en fin de saison dernière, vous doutiez-vous que ce serait aussi compliqué pour Labruguière ?
Il n’y avait que 24 joueurs susceptibles de reprendre, donc la situation était très difficile à la base. Mais j’avais beaucoup d’idées. Je voulais faire venir un kiné, faire intervenir des entraîneurs pro, ou d’autres univers, pour garder l’esprit combatif. On est parvenus à faire un stage de début de saison qui s’est très bien passé, même avec très peu de moyens. Maintenant, on a perdu le premier match à domicile de deux points contre Verdun, le deuxième d’un point contre Vielmur, on perd 14-20 contre Vabre, 11-14 contre Viviez, bref, on n’était pas si loin que ça. Mais quand on enchaîne 6 défaites, et que la septième on prend presque 80 points contre Castelnau Montratier, là c’était très dur à vivre oui.
Vous avez senti le groupe lâcher ?
Pas du tout, c’est juste que que nous sommes partis là-bas avec 17 joueurs seulement, et parmi eux certains disputaient leur premier de rugby de leur vie. C’était impossible de rivaliser et à la sortie, l’addition est salée.
Vous avez enchaîné 15 défaites d’affilée, et dimanche dernier, vous avez battu le deuxième de la poule, qui clin d’oeil du destin, était l’équipe de Castelnau Montratier justement. Comment expliquez-vous cette première victoire ?
On a maintenu le groupe en éveil d’abord. J’ai réussi à faire venir David Darricarrère, Romain Martial, Matthias Rolland pour des séances spécifiques. Il y a eu l’arrivée de nouveaux joueurs, des novices, et même des footeux, attirés par ce qu’il se passait en interne, qui entendaient de bons échos de ce nous proposions, malgré les mauvais résultats. Les anciens sont revenus, et puis les nouveaux comprennent plus, et de mieux en mieux les combinaisons. C’est un tout. Depuis début janvier, nous arrivions à rivaliser un peu plus, nous sommes en progression constante.
De là à battre le second de la poule ?
Je peux comprendre cet étonnement, vu de l’extérieur. Je peux juste vous dire que je suis fier de l’évolution des mecs : ils se parlent plus, communiquent plus, avec une meilleure organisation, une meilleure animation. Cette victoire, ils sont allés se la chercher, c’est vraiment bien pour eux. Il faut quand même savoir qu’on avait des juniors qui sont montés avec nous, et qui restaient sur 32 ou 33 défaites consécutives ! Vous vous rendez compte ?! Deux ans sans gagner. Mathieu Couzinié en était à 39 lui. C’est peut être un record du monde (rires). Non, sérieusement, c’est une belle récompense pour tout ce groupe.
Vous parlez de la satisfaction des joueurs, mais pas de la vôtre …
Je suis un jeune entraîneur, qui débute. J’ai passé ma formation au Comité, je me suis investi, et j’y ai passé beaucoup de temps, car ça me plaisait énormément. Donc vivre une telle saison, c’est compliqué, forcément. On se pose des questions. Mais je me suis accroché, à ce groupe de potes, car ce sont aussi mes potes. J’habite dans ce village, et je suis fier d’en défendre les couleurs. Je suis rempli de quelques valeurs, et je prends cette victoire comme une récompense personnelle aussi. Mais que ce fut long !
Comment voyez-vous la fin de la saison après ce premier succès ?
Il nous reste un match à l’extérieur chez le leader Villefranche de Rouergue, on ira là-bas pour faire au mieux encore une fois. On tiendra ce qu’on tiendra. Puis on va recevoir Lacaune, autre équipe très solide, qui nous en avait mis 64 à l’aller. Mais très sincèrement, on va se servir de ces deux matchs pour se recentrer sur la Coupe des Pyrénées. C’est une belle compétition à jouer, idéale pour se relancer, et créer une nouvelle dynamique qui pourra servir pour la saison prochaine.
Justement, Charles Martin (co-entraîneur) a annoncé qu’il va arrêter. Et vous, que comptez-vous faire ?
C’est au bureau et au président d’en décider. J’ai donné de l’envie je crois, je pense avoir fédéré aussi. J’aurais aimé apporté plus, c’est sûr mais bon…Pour une première expérience, elle est plutôt atypique ! On y laisse des plumes, mais j’ai gardé l’envie. Pourquoi pas persévérer, avec un bon recrutement ciblé, efficace, et repartir pour une belle aventure. Si tout le monde adhère au projet, je serai partant pour aider à reconstruire oui. Il y a de bonnes bases, une belle école de rugby, des personnes impliquées. Ce club mérite d’être soutenu.