Jégou-Auradou, Auradou-Jégou, à croire que ces deux noms seront indissociables toute leur vie désormais. Il faut dire que leur sortie nocturne argentine du 6 juillet, après leur première sélection internationale, a mis en même temps une femme et le rugby français dans de sales draps. Accusés de viol aggravé, puisque en réunion, leur arrestation, leur détention, et leur libération ont fait le bonheur de tous les médias, et le déshonneur du rugby français. La sélection des 42 annoncée hier, a ravivé cette affaire. Une de plus. Et notre désarroi aussi. D’où ce billet d’humeur… (par Jonah Lomu)
Oscar, Hugo, il n’y a rien de personnel dans ce que l’on exprime ici. Mais bon, depuis l’annonce des 42 hier, on ne parle que de vous, ou presque. Vous n’y êtes pour rien, cette fois, c’est plutôt Fabien qui vous met dans l’embarras et la gêne. Et nous avec.
Vous êtes sûrement innocents des faits qui vous sont reprochés, on veut bien le croire. Mais le non lieu dans votre affaire, qui signifie l’arrêt des poursuites, n’est pas encore close, puisque votre ex-copine michetonneuse d’une soir a fait appel. Et cet appel sera traité le 10 février prochain, juste après Angleterre-France.
Vous n’êtes donc pas coupables, à ce jour, mais en revanche vous restez responsables. Surtout avec l’étiquette d’international dans le dos. Porter le maillot bleu vous oblige à cette exemplarité que votre sélectionneur réclame pourtant depuis longtemps.
Vous représenterez peut être le futur des Bleus, mais pour le moment, vous avez sali son passé, et son présent, tant vous êtes au coeur à nouveau de toutes les discussions depuis hier.
On pouvait largement se passer de vous pour éviter de nouvelles polémiques non ? Nul jugement sportif, il y a 70 millions de sélectionneurs en France, c’est bien connu. Non, on parle juste de morale, d’éthique, de savoir vivre et d’une certaine logique. Que va-t-on dire dans les écoles de rugby, dans les cours de récrée, à la machine à café, à table, dans les vestiaires, et dans le club house dimanche ?
Ce n’est juste pas un bon message envoyé aux licenciés et surtout aux licenciéEs, aux hommes et aux femmes en général, de vous voir « récompensés » après avoir fauté de la sorte. Se mettre sur le toit pour votre première sélection, après une victoire, bon, ça peut se comprendre. Mais en Argentine, à quelques jours d’un autre test match, rentrer à 5h du mat avec une dame de bonne compagnie pour finir la nuit, devant les caméras d’un hôtel forcément repéré, c’est quand même pas très approprié.
Nous, en France, on avait une première fracture sociale et une dissolution politique à gérer, on se serait bien passé de la dissolution rugbystique. On s’est sentis honteux, merdeux même, à baisser la tête. Mais sans détourner notre regard sur les abus, la violence, et toutes les addictions qui font trop souvent la Une.
Les repris de justesse qui jouent à Montpellier, les Grenoblois, Melvyn Jaminet, le dopage, les Sud Af, Camille Chat, etc… pas une semaine ne passe sans une nouvelle affaire, ou un passage au tribunal. Même les footeux ont voulu nous donner des leçons de bonne conduite, c’est dire.
La seule mise en examen qui tienne à ce jour, c’est celle de notre conscience. Soyons fous : on aurait aimé une conférence de presse pour votre retour en France, pour votre reprise en Top 14 ou au lendemain de l’annonce du non lieu. Non pas pour parler de votre affaire, il y a encore une instruction en cours, on a bien compris que la plaignante avec son avocate semblent bien décidées à aller au bout encore. Mais juste vous entendre nous dire :
« La justice fait son travail, on a confiance, mais sachez que nous sommes désolés de toute cette histoire. On n’aurait pas dû faire monter cette dame, on aurait pu faire preuve d’un peu plus de retenue, de bon sens, on a mal agi, on regrette… » Un truc du genre quoi.
Vous avez 21 ans, et que celui qui n’a jamais pêché vous jette la première pierre. Vous avez toute la vie devant vous, et on vous la souhaite belle. Vous avez de grandes qualités sur le pré, mais vous n’avez pas encore les galons d’incontournables au niveau international a priori, et il y avait du monde en 2ème et 3ème ligne pour passer le Tournoi 2025 sans s’offrir de nouvelles polémiques.
L’occasion était belle de ne pas vous prendre, ce qui aurait pu s’assimiler à une tape sur l’épaule et sur les doigts d’un bon père de famille. Oui, quitte à en vexer quelques uns, sûrement adeptes de l’éducation positive, on espérait secrètement ne pas vous voir dans les 42, car on savait que votre affaire serait largement reprise par tous les médias et les autres, si ravis de l’aubaine. Pour ce Tournoi, et pour bien commencer 2025, on espérait juste parler rugby, et que de rugby..