Ce dimanche, l’ambiance était particulière au stade du Bazacle à Toulouse centre. Usuellement, tel rassemblement se déroule lors du dernier match de poule à la maison. Cette fois, c’était autour de la mémoire d’un grand homme du TEC Rugby que toute la famille jaune et noire, et plus encore s’était donnée rendez-vous… (par PB)
Chaque club a sa vie, ses joies et ses épreuves. Chaque année ou presque, l’un d’entre eux voit une de ses étoiles filer. Le TEC Rugby a perdu plus qu’une étoile le 19 juin dernier. Le club du centre-ville toulousain a vu son soleil s’éteindre, discrètement après des mois de lutte, juste après les festivités du 60ème anniversaire du club. Jean-Pierre Villenave, à seulement 49 ans, aura passé toute sa vie au club. De l’école de rugby à l’équipe sénior où il jouera avec son frère aîné, puis entraîneur et dirigeant, ce grand homme a occupé tous les postes au sein du club tant sa générosité était énorme. « Généreux et perfectionniste » raconte Xavier Villenave avec qui il a porté les couleurs jaunes et noires en séniors, et qui l’a eu comme entraîneur ! « Capitaine de l’équipe 1, il ne me faisait pas de cadeau…au point de me faire jouer remplaçant en réserve quand on s’embrouillait fraternellement…au sujet du TEC. » témoigne-t-il entre rires et émotions.
Un autre grand du club, Pierre Corbarieu, très touché, évoque la générosité de l’homme : « Quand je suis arrivé au club en 2002, ce n’était pas que le rugby que j’étais venu chercher ici. Je venais de vivre un drame personnel très dur, et c’est Jean-Pierre qui m’a beaucoup entouré, sur qui j’ai pu compter. Un réel grand frère. Je l’ai connu joueur jusqu’à sa blessure à l’épaule, puis entraîneur. J’ai vécu de bons très bons moments de rugby et troisième mi-temps ici, mais celui qui incarnait cet esprit familial du TEC, attentionné, proche, courageux : c’était JP. Il me manque terriblement. Je pense à toute sa famille ». En ce dimanche 15 octobre, dame nature a été au rendez-vous, avec un soleil resplendissant, comme un clin d’oeil venu d’en haut bien présent « JP nous regarde » lança un ancien !
Juste avant le coup d’envoi du match des équipes séniors fanions, à 15 heures, en présence du président du comité Midi-Pyrénées, Gilles Sicre, le président du TEC, Christian Lembeye, a pris la parole pour évoquer Jean-Pierre Villenave :«Un homme passionné, indispensable, véritable âme du club » des mots forts, précis, prononcés en présence de ses parents (son père fut président du TEC Rugby, sa mère dirigeante), de sa veuve et de ses trois enfants. L’ensemble des acteurs du match se sont alors mis en ligne, au centre du terrain, face au public nombreux, et à la demande du président « une minute d’applaudissements » a été respectée.
Un moment fort de communion et un grand frisson d’émotion a alors parcouru l’enceinte du stade du Bazacle. Certains ont craqué à la fin de ce vibrant hommage. Il faut dire, pour ceux qui n’ont pas connu le bonhomme, qu’évoquer Jean-Pierre Villenave va bien au-delà du ballon ovale et des crampons. L’homme était un humaniste, bénévole, généreux. Chez lui, peu ou pas de jugements de valeurs. Toujours décortiquer pour comprendre. Analyser pour résoudre… humainement. Pas de discours chronophages de salons mais de belles et longues discussions. Il incarnait le don de soi. Pas d’extrémisme là-dedans, juste une valeur humaine en perdition : partage du temps et convivialité. Il était aussi épicurien et son goût pour les chansons des années 70-80 en faisait un redoutable adversaire au blind-test.
Le match des équipes fanions a été âpre. Indécis jusqu’à l’avant dernière minute. A la mi-temps rien n’était joué, les locaux croyaient bien avoir assuré l’essentiel contre Montredon, lorsqu’ils transformaient une pénalité par Nicolas Guerard, à 15 minutes du terme (10-5). Le match va trouver son issue sur une interception du centre bleu et blanc tarnais qui file entre les perches à la 78ème minute. 10-12, score final, vu d’en haut, JP a quand même dû apprécier.
Laissons la parole à Vincent Alcrudo, figure emblématique du club depuis quinze saisons, toujours en activité. Bien que déçu par le résultat du match, Vincent notait que l’engouement populaire du jour avait été à la hauteur de l’immense homme qu’était Jean-Pierre : « Des anecdotes pour caractériser le cœur et la sensibilité de Jean-Pierre, j’en ai des dizaines », dit-il « Ce beau moment qui nous a tous réuni ici, pour lui, cela prouve s’il en était encore besoin, que JP était très aimé par ses pairs. Tous ces anciens de toutes les générations présents aujourd’hui au bord du terrain, et après le match qui restent boire un coup, c’est franchement émouvant» conclut-il, touché.
Jean-Pierre Villenave n’est plus, certes, mais sera toujours présent.